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Avant-garde

Le marxisme c’est pas sorcier

L’origine du mot

Le mot avant-garde apparaît au XIIe siècle. « Garde » (sentinelle) vient du francique (la langue des Francs) « wardon », veiller, être en alerte. « Avant » ajoute au mot une dimension collective et dynamique : « Détachement de sûreté rapprochée précédant une troupe en marche pour la renseigner et faciliter son engagement » (Petit Larousse). L’image est excellente pour exprimer le rôle des communistes, organisés en parti, vis-à-vis de leur classe. La tête d’une armée en mouvement !

Signification

Le chapitre II du Manifeste, intitulé « Prolétaires et communistes », utilise le mot « fraction » pour définir le lien qui unit les uns et les autres : « En pratique, les communistes sont la fraction la plus résolue des partis ouvriers de tous les pays, la fraction qui entraîne toutes les autres ; sur le plan de la théorie, ils ont sur le reste du prolétariat l’avantage d’une intelligence claire des conditions, de la marche et des résultats généraux du mouvement prolétarien ».
Lénine a exactement la même vision. « Trotsky », écrit-il, « a très mal compris l’idée fondamentale de mon livre Que faire ?, quand il a dit que le parti n’était pas une organisation de conspirateurs... Il a oublié que le parti doit être seulement le détachement d’avant-garde, le dirigeant de l’immense masse de la classe ouvrière » (1).
Si le parti est l’avant-garde de la classe, la classe ouvrière elle-même est l’avant-garde des autres classes révolutionnaires. « L’ouvrier russe... conduira le prolétariat russe... vers la victoire de la révolution communiste », écrit Lénine dix ans avant Que faire ?, à 23 ans (2). Une avant-garde, par définition, est minoritaire. Il est réformiste de croire que, sous le capitalisme, le parti puisse regrouper les larges masses de travailleurs, ou que la classe ouvrière doive être majoritaire pour exercer son pouvoir. Inversement, les militants communistes « constituent l’avant-garde des masses précisément dans la mesure où ils n’en sont pas coupés » (3).
En l’absence de révolution, le parti a donc à la fois des airs de parti réformiste, dirigeant des luttes immédiates, et des airs d’avant-garde sans troupe, politiquement minoritaire. « On parle de capitaines sans armée », écrit Gramsci, « mais en réalité il est plus facile de former une armée que de former des capitaines » (4).

Les mots qui servent à camoufler

Le radicalisme libertaire ou trotskiste (grève générale) et le réformisme droitier (élections, élections !) se rejoignent pour éviter autant que possible la notion d’avant-garde, notion « léniniste » qui mènerait directement au stalinisme et qui transformerait la dictature du prolétariat en dictature sur le prolétariat. Certains ne rejettent pas le mot, mais c’est pour mieux le vider de son contenu. Le parti, c’est nous, disent-ils, alors qu’ils sont une petite organisation, voire une poignée de militants. Ou bien : l’avant-garde, ce sont tous ceux qui luttent... ou qui votent « à gauche ».

Pour en savoir plus

1) Lénine, tome 6, p. 526.
2) Tome 1, p. 325.
3) Plate-forme politique de VP, cahier 4, n° 722, « Détacher une nouvelle avant-garde ».
4) cité dans Labica, Dictionnaire critique, p. 334.

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