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Après le retrait de la loi et la mort de Malik, TOUT NE FAIT QUE COMMENCER !

Tract 11 décembre 1986

Le tract original d’époque à télécharger au format pdf

UNE VICTOIRE QUI PESERA LOURD...

Oui, le retrait pur et simple de la loi Devaquet/Monory est une victoire importante. Le gouvernement a dû plier et toucher terre dans sa partie de bras de fer engagée avec les jeunes et les étudiants.

Et cette victoire va bien au-delà du simple retrait de la loi :
• Une brèche a été ouverte dans la politique d’un gouvernement libéral, élu sur le maintien de l’ordre et de la fermeté, sur la concurrence exacerbée entre les hommes.
• Le débat s’est engouffré parmi des centaines de milliers de jeunes, et partout on débat passionnément de la violence, du gouvernement, de l’enseignement et du rôle de l’Université. C’est cela la vraie politique, pas celle des partis traditionnels, mais celle de la vie de tous les jours, de la société, et c’est ce qu’ont découverts les lycéens, les étudiants.
• Les autres secteurs populaires, ouvriers en tête, ont maintenant la preuve qu’il est possible de faire céder un gouvernement bourgeois, ce dont ils avaient perdu l’habitude, endormis par cinq ans de gouvernement de gauche ...

Déjà Chirac rapporte le débat sur le Code de la Nationalité, en Avril.
Oui, on n’a pas fini d’entendre parler de Décembre 86 ...

PLUS JAMAIS CA ?

Malik est mort pour que cette loi disparaisse, assassiné par les commandos de l’Etat. Des dizaines de blessés, certains gravement.
Nous étions Jeudi des centaines de milliers à défiler en signe de protestation.

Mais pourquoi en est-on arrivé là ?
Faut-il que le sang coule pour obtenir satisfaction ?
Cette société est celle de la violence, de la violence quotidienne. A la même heure que Malik, Abdel était abattu par un flic à Aubervilliers. Avant lui, des dizaines de jeunes immigrés étaient la victime des crimes racistes. Dans le 20° Arrondissement, près de 20 personnes sont déjà mortes dans les incendies criminels des hôtels où logent des familles africaines. Tous les jours des ouvriers meurent d’accident du travail, ou se suicident d’être trop longtemps au chômage...

Plus jamais ça ? Qui nous fera croire qu’avec cette vie de plus en plus dure, on peut arriver à une vie tranquille, pacifique, paisible ?
Malik, comme Eloi Machoro, comme le photographe de Greenpeace sont morts en défendant une cause juste. Et plus la crise économique se durcira, plus la protestation grandira, se fera menaçante, plus les bourgeois auront peur, plus ils useront de la violence pour maintenir leur contrôle sur la société.

La voilà leur démocratie ! Le masque tombe, et seul reste devant les yeux le cercueil de Malik !

Face à cela, depuis des siècles, les travailleurs, les ouvriers ont dressé leur drapeau, de la couleur de ce sang qui coule, le drapeau rouge. Le drapeau de la révolte et du combat, qui refuse l’abattement et la résignation ! Pas d’autre choix pour en finir avec la violence quotidienne de cette société !

OUI A LA JONCTION DES TRAVAILLEURS ET DES ETUDIANTS

Jeudi travailleurs et syndicats défilaient à côté des lycéens et étudiants. C’est une excellente chose.

Parce que la sélection, ce n’est pas qu’à l’université qu’on la connaît. Dès la maternelle ça commence et toute l’école, primaire, secondaire, supérieur, a pour but de fournir à l’industrie, à la production les travailleurs nécessaires : beaucoup d’ouvriers, un peu de techniciens, très peu de cadres, pour résumer.

Alors la formation, l’école, c’est tout le monde qui est concerné !
Parlons-en, tous ensemble, pour modifier l’enseignement, pour transformer le travail à l’usine, pour effacer cette division qui ne fait que s’accroître entre travailleurs manuels et intellectuels.

LA GAUCHE, UN APPUI ?

En se tournant vers les syndicats, on redore sérieusement le crédit d’une gauche qui n’a pas de quoi être fière ; qu’on en juge :
• 1984, conflit à Talbot, des centaines d’ouvriers envoyés au chômage avec la bénédiction des Confédérations Syndicales.
• Eloi Machoro, dirigeant du FLNKS abattu sur ordre par la gendarmerie en Nouvelle Calédonie.
• Sur l’enseignement, trois blessés graves à Paris VIII en Novembre 83, lors des protestations contre la limitation des inscriptions des étudiants étrangers. Quant au projet de Chevènement sur "l’élitisme républicain", Monory s’en réclame ouvertement aujourd’hui !
• Enfin, à propos du "Charter pour le Mali" réservé à Monory et Devaquet, ne faudrait-il pas rajouter un charter pour Joxe, qui expérimenta la méthode le 17 Juillet 85 ?

Démocratie et concertation, la gauche n’a plus que cela à la bouche, mais quand elle était aux affaires, elle n’a cédé qu’aux revendications de la droite et de la réaction (médecins, école privée, transporteurs ...)

LA LOI SAUTE, L’INEGALITE RESTE !

Malik n’est pas mort seulement pour le retrait d’une loi. Il est mort pour certai¬nes idées, contre la sélection, le racisme, pour le droit au travail.

La loi est retirée, tout ne fait que commencer, les problèmes restent entiers :
• la crise économique et le chômage,
• le racisme, les crimes racistes, les expulsions, le pillage du Tiers-Monde, le Code de la Nationalité (même repoussé)
• Quelle université pour quelle société ? Les débats proposés par Paris VIII sur l’étude du contenu de l’enseignement doivent se généraliser et s’étendre dans toutes les facultés.

Objectif atteint ? Une toute première marche seulement.
Parce que l’inégalité, la concurrence, la sélection, la compétitivité, l’exploi¬tation et l’oppression des hommes et des peuples, ce sont les FONDEMENTS de cette société. Le mouvement a permis d’enrayer une nouvelle attaque.

Mais si nous voulons parler travail pour tous, coopération, utilité sociale, amitié entre les peuples et rejet du nationalisme, libération et épanouissement dans le travail, transformation de l’école et de l’enseignement, il reste bien du chemin à faire ...

Alors là, le sang versé de Malik et de tous les autres ne l’aura pas été seulement pour le retrait d’un projet qui a toutes les chances de nous être resservi petit morceau par petit morceau.

Aujourd’hui, dans toutes les écoles, les lycées, les facultés, et dans toutes les usines, c’est de cela qu’il faut parler, c’est comme cela qu’il faut CONTINUER !

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