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PSA : Contre le travail à la chaîne

Dans le cadre de sa programmation « la comédie du travail », le cinéma l’Ecran de Saint-Denis a organisé le 2 février une projection de deux documentaires sur le travail à la chaîne :

De 1974, « Avec le sang des autres » est un tournage semi-clandestin réalisé à Peugeot par Bruno Muel avec le soutien du groupe Medvedkine. Il nous montre le quotidien des ouvriers : ramassage par des cars dans toute la région de Besançon, travail pénible, physiquement exténuant, sur les chaînes de production, dans des ateliers gras, sales et bruyants. Christian, ouvrier, y exprime sa révolte totale non seulement contre la chaîne, mais contre un corps brisé et une vie meurtrie. « Mes mains, je ne les sens plus, quand je veux aimer ma femme ou m’occuper de mon enfant ; je pourrais faire tant de choses, mais Peugeot me les prend ».

En 2010, dans le film de L. Jourdan « Sochaux, cadences en chaîne », la réalisatrice nous fait parcourir les ateliers propres et lumineux de Sochaux, évoluant au fil du temps, jusqu’à ce que l’on découvre le plus récent, phase du toyotisme : dans l’atelier de ferrage se meuvent les robots qui effectuent le port de lourdes pièces autrefois entre les mains des ouvriers. Là où l’on avait vu un groupe d’ouvriers, se glisse désormais la silhouette d’un homme qui s’active seul entre les bras géants. Les pires pages de 1984 de G. Orwell n’ont pas atteint ce degré d’horreur dans la solitude parmi les machines. Autre « détail » non sans importance : le travail intérimaire est désormais privilégié. Bien sûr, le PDG Streff exprime des objectifs clairs : compétitivité, hausse du profit, diminution de l’emploi humain. Sans état d’âme.

Plusieurs points ont été abordés à l’occasion du débat de cette soirée :
Est-ce que c’était pire avant, ou maintenant ? Au service de qui, tout ce progrès technique qui soulage l’ouvrier de certaines tâches, sachant que tout le temps gagné en productivité n’est pas redistribué aux ouvriers, mais réinjecté en nouvelles tâches imposées ?
Faut-il demander en priorité des augmentations de salaire pour recevoir un retour de ce gain de productivité uniquement affecté au profit, ou une RTT afin de souffler, de ménager le corps épuisé par la production ? Les deux sont nécessaires...
Et pourquoi la médecine du travail ne peut-elle strictement rien contre toutes ces souffrances constatées : les TMS ? Rien en termes de soins, et maintenant chez PSA, rien en termes de proposition de poste aménagé. On évacue vers la sortie les ouvriers laminés et usés.
Et encore, comment faire reconnaître syndicalement le harcèlement exercé par la direction sur certains ouvriers qui résistent et se syndiquent. L’un d’eux vient de se voir infligé 6 jours de mise à pied sur 3 semaines : une nuit, deux jours de pause, une équipe de jour, pause, une équipe de soir, pause, et on recommence, au point de le rendre fou parce que l’organisme perd tout rythme.

Il ne s’agissait pas d’une soirée militante au sens classique, mais d’un échange de témoignages (cinéastes engagés, sociologues, ouvriers de Peugeot Sochaux et Aulnay-sous-bois). Mais dans un contexte où la réalité de l’usine est escamotée par le discours patronal sur la concurrence, moyen de chantage pour faire accepter le pire (voir Fiat), cette dénonciation du travail à la chaîne, qui se développe partout dans le monde, était importante.
Notre combat de syndicalistes et de militants politiques ne doit pas s’arrêter aux revendications. Nous devons entrer dans l’analyse critique de la division capitaliste du travail qui nous détruit physiquement et psychiquement. Voilà qui indique l’ampleur de la révolution à faire demain.

B.C.

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