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Il faut lire Franz Fanon !

Partisan N°251 - Novembre 2011

Il y a 50 ans, le 6 décembre 1961, mourait Frantz Fanon, martiniquais, médecin psychiatre et communiste. Né à Fort-de-France en 1925, il s’est engagé aux côtés du FLN algérien. Il meurt jeune, à 36 ans, en exil à Tunis, alors que la guerre d’Algérie n’a pas encore pris fin. Lorsqu’il publie « Les damnés de la terre », il sait qu’il va bientôt mourir d’une tumeur fulgurante. Lui qui a déjà écrit plusieurs ouvrages, il écrit cet essai comme la synthèse de sa pensée politique. Il est une des figures les plus intéressantes du mouvement de libération nationale algérien.
« Les damnés de la terre  » est un manifeste politique. Il en cherche pas à démontrer les choses, il les affirme. Fanon se base sur son expérience au service de la lutte de libération algérienne, sur son expérience de médecin psychiatre aussi, confronté aux mutilations du colonialisme sur les esprits. C’est là qu’il a compris que la libération devait passer par une lutte contre l’aliénation.
Fanon est communiste. Il n’a jamais été membre d’une organisation communiste, mais il pose son analyse en termes de lutte de classe, et affirme que la lutte de libération nationale n’a de raison d’être que si elle débouche sur le socialisme. Il analyse les différentes classes dans les pays coloniaux, leurs caractéristiques politiques. Pour lui, ce sont les masses qui doivent faire la révolution, principalement la paysannerie pauvre, face aux colons, aux vendus et aux réactionnaires. Fanon assume la violence. La libération, la révolution ne peuvent que passer par là. Il commence par une critique des intellectuels réformistes, qui espèrent pouvoir se concilier avec l’impérialisme pour en obtenir quelques faveurs.
Le succès de la lutte de libération repose sur une révolution culturelle et idéologique parmi les masses. Les colonisés doivent se libérer de l’idéologie de soumission imposée par les colonisateurs, mais aussi de tous les préjugés réactionnaires. Fanon a bien remarqué que c’est dans la lutte de classe que la conscience fait des bons. Que chez les peuples en lutte pour leur libération, la mobilisation, l’organisation et les sacrifice éduquent et éclairent. Il affirme que les intellectuels révolutionnaires doivent aller dans le peuple pour apprendre de lui et lui apprendre en retour, pour qu’il prenne son destin en main. Tout cela, Fanon l’explique très bien. Son œuvre est constituée à la fois de réflexions théoriques générales et de propositions politiques concrètes, tirées de son expérience : Comment organiser une armée du peuple ? Quels liens entre les masses et l’avant-garde ? Comment transformer la colère et la spontanéité en organisation et en projet politique ? Des sujets qui nous intéressent au plus haut point, nous, les maoïstes...
Bien sûr, ses analyses appellent quelques critiques et il faut en pointer certaines contradictions. Mais celles-ci sont secondaires par rapport à leur contribution au savoir du mouvement communiste mondial. Frantz Fanon mérite d’être lu et étudié, d’autant plus que son oeuvre est bien trop souvent ignorée ou tronquée par les rares qui l’abordent.

 

Axel

 

« Les damnés de la terre », La Découverte/Poche 2002, 9,90 euros.

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