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Été 1914 : les contradictions inter-impérialistes éclatent
Partisan N°271 - Février 2014
La terrible guerre qui se déclenche le 28 juillet 1914 n’était pas un « coup de tonnerre dans un ciel serein ». Il ne faut pas croire que le monde nageait alors dans la paix et la prospérité, période heureuse qui aurait été brusquement interrompue par l’assassinat de l’archiduc Ferdinand II à Sarajevo, événement qui conduira aux déclarations de guerre.
Crise mondiale du capitalisme
Entre le milieu des années 1870 et le milieu des années 1890, les économies capitalistes avaient été frappées par la « longue dépression », première grande crise économique mondiale. Celle-ci n’est résorbée, notamment, que par une concentration encore plus accrue du Capital, qui génère cartels et trusts impérialistes encore plus favorables aux politiques agressives : l’Allemagne est en pointe dans ce phénomène. Les États adoptent une politique commerciale plus protectionniste, limitant l’accès de leurs concurrents à leur marché intérieur. L’expansion coloniale a été également un moyen de résorber cette crise. Les capitalistes tentent ainsi d’enrayer la baisse irrémédiable de leur taux de profit. Ainsi, le besoin, pour chaque impérialisme, d’obtenir un accès privilégié aux matières premières et de nouveaux débouchés pour leurs produits manufacturés relance l’expansion coloniale. Jules Ferry dira : « La politique coloniale est fille de la politique industrielle. » Et la concurrence coloniale mène à la guerre...
Rivalités coloniales
France, Allemagne, Royaume-Uni et les autres sont concurrents pour se tailler les empires coloniaux les plus gros possibles. A ce jeu, les vieilles puissances ont une longueur d’avance. Les nouvelles, comme l’Allemagne, sont frustrées de devoir se contenter des restes. En 1885, dans le cadre du traité de Berlin, tous ces États se sont formellement partagé l’Afrique. Mais l’avidité des bourgeoisies impérialistes est sans limite, et chacune continue à lorgner sur le domaine des autres. L’expansion des marchés coloniaux exclusifs est limitée par la taille finie de la planète. En géopolitique impérialiste, la dialectique s’applique pleinement : la contradiction est la règle, la stabilité l’exception. L’accord de 1885 ne tient pas longtemps. A Fachoda, en 1898, dans la haute vallée du Nil, colonisateurs français et britanniques sont à deux doigts d’en venir aux armes pour le contrôle du Soudan. En 1911, c’est le « Coup d’Agadir » : Allemands et Français se disputent le Maroc, et la guerre faillit éclater avec 3 ans d’avance. Les deux pays sont opposés par une rivalité particulièrement forte : après sa défaite dans sa guerre contre la Prusse en 1870, la France avait du céder à l’Empire allemand l’Alsace-Moselle, qui comptait pour 20% de son industrie sidérurgique, et payer 5 milliards de francs-or d’indemnité.
L’impérialisme, c’est la guerre
La guerre de 14-18 est simplement l’éclatement en conflit militaire ouvert de contradictions entre puissances impérialistes qui n’ont fait que s’aiguiser au fil des décennies précédentes. La crise économique capitaliste de la fin du XIXe a précipitée le développement des capitalismes nationaux en puissances impérialistes agressives. Lénine, en 1916 (1), a dégagé les principales caractéristiques de ce nouveau stade du capitalisme : formations de monopoles capitalistes, exportation de capitaux dans le monde entier, partage du monde entre quelques grandes puissances, domination totale du Capital financier... En somme, le capitalisme mène à la guerre, aussi bien économique que militaire.
