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La dette et la France

Le crédit et la dette viennent de la baisse inévitable du taux de profit dans la production. Du fait de la concurrence entre industriels, les capitalistes investissent dans la spéculation, là où il leur paraît plus facile de faire du profit.

 

Par ailleurs, les capitalistes ont développé le crédit pour tenter de faire face à la contradiction entre, d’un côté, le fait qu’ils leur faut continuellement baisser les salaires de leurs ouvriers et employés pour rester compétitifs, alors que, de l’autre, les clients doivent continuer à pouvoir acheter leurs produits. Comme on l’a déjà beaucoup écrit dans Partisan, la spéculation et la crise du crédit ne sont que les symptômes de la crise générale de l’économie capitaliste, et non pas le résultat de l’ « irresponsabilité » des banques ; dans une économie capitaliste, les capitalistes tendent inévitablement vers la spéculation.
La dette des États s’est alourdie au fil des crises ; à chaque fois, les capitalistes ont joué de plus en plus gros, et perdu en conséquence. À chaque fois, les États ont dû venir à leur secours et les renflouer plus ou moins directement, et ça leur a coûté cher. Par ailleurs, avec la montée du chômage et de la pauvreté parmi le prolétariat des vieux pays impérialistes, les États doivent financer des mesures de protection sociale qui, si elles ont tendance à diminuer pour chacun, doivent couvrir de plus en plus de monde, pour éviter l’explosion sociale et maintenir un certain niveau de consommation. Tout cela fait que les dépenses publiques ont fortement augmenté dans tous les pays impérialistes depuis la seconde guerre mondiale (même dans les pays dit « libéraux » comme les USA), avec pour conséquence l’augmentation de la dette publique.

Nous paralyser, et nous faire payer

En ce qui concerne la France, la dégradation de sa note par les fameuses « agences de notation » annonce un renchérissement de l’emprunt, c’est-à-dire que les créanciers n’accepteront de lui prêter qu’à un taux d’intérêt plus élevé qu’avant. Par ailleurs, l’argent prêté à la Grèce par le Fond européen de stabilité financière (FESF) sera lui-même emprunté par les États qui vont le financer, dont la France ; ceux-ci espèrent donc pouvoir le financer avec des prêts contractés à un taux égal, voir inférieur, à celui auquel ils vont prêter à la Grèce, et faire ainsi un peu de profit au passage, ou au moins ne pas perdre d’argent. D’où l’inquiétude de voir leur note dégradée, donc d’avoir à prêter à perte à la Grèce. Untel emprunte à untel pour prêter à un troisième ; la finance capitaliste est organisée selon un cascade de crédits. Il suffit qu’un seul maillon soit fragilisé pour que tout le monde prenne peur. Au final, même du point de vue strictement capitaliste, l’argent prêté à la Grèce ne réglera rien, car il faudra toujours rembourser l’argent emprunté pour rembourser une dette.

 

La France, contrairement à la Grèce, ne risque pas la faillite à court terme : c’est un pays impérialiste, qui dispose encore de suffisamment de moyens économiques, politiques et militaires de redresser ses comptes en cas de besoin. Si le gouvernement agite le spectre de la faillite, c’est surtout pour paralyser les exploités et les faire payer. La bourgeoisie française craint en réalité de voir ses grandes banques mises en difficulté par une faillite grecque, de voir augmenter le coût de l’argent qu’elle emprunte, et de se retrouver ainsi en position encore plus difficile dans la concurrence inter-impérialiste alors qu’elle est déjà derrière les USA, la Chine, l’Allemagne... Il lui faut donc faire payer à la fois les petits pays et ses propres travailleurs.

 

Axel

Karl Marx et la dette

 

Il y a environ un siècle et demi, Marx écrivait : « La dette publique, en d’autres termes l’aliénation de l’Etat, qu’il soit despotique, constitutionnel ou républicain, marque de son empreinte l’ère capitaliste. » « Les emprunts, qui mettent les gouvernements à même de faire face aux dépenses extraordinaires sans que les contribuables s’en ressentent sur le champ, entraînent à leur suite un surcroît d’impôts ; de l’autre côté, la surcharge d’impôts causée par l’accumulation des dettes successivement contractées contraint les gouvernements, en cas de nouvelles dépenses extraordinaires, d’avoir recours à de nouveaux emprunts. » D’où « la grande part qui revient à la dette publique et au système de fiscalité correspondant, dans la capitalisation de la richesse et l’expropriation des masses. » (Le Capital, chapitre XXXI).

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