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Népal : une rencontre avec Gaurav

Gaurav est venu en Europe en octobre. C’est un des principaux dirigeants du Parti Communiste du Népal maoïste (PCNm) créé en juin 2012, par scission d’avec le PCNUm (unifié). Il a rencontré des militants autour du comité de solidarité franco-népalais. Voici quelques notes partielles.
Dans son introduction, il rappelle qu’il veut garder contact avec tous les maoïstes du monde entier.
La guerre populaire, dit-il, a commencé en 1996. 80 % du territoire avait été gagné. Il y avait une armée populaire de 25 000 combattants. Mais les dirigeants du parti Prachanda et Battarai ont trahi, sont devenus ministres, ont accepté la fin de la guerre populaire, l’intégration de l’armée populaire dans l’armée nationale, la fin de l’occupation des terres... Dans les négociations, il était signé que la paix provisoire serait prolongée en paix définitive. Aujourd’hui nous n’avons ni constitution, ni parlement, ni bases populaires, ni armée populaire ; nous avons tout perdu.
Quand l’accord en 12 points a été signé avec les parlementaires en 2005, nous étions, Kiran et moi, en prison en Inde. Relâchés en 2006, nous avons examiné la ligne du parti et commencé la lutte de ligne. Nous avons défini notre lutte comme la construction d’un parti dans le parti, d’une organisation dans l’organisation. Nous avons organisé des manifestations contre Prachanda, et Battarai lorsqu’ils ont donné les clefs des containers d’armes. En 4 ans de lutte de ligne, nous avons gagné de nombreux cadres. Trois mois après la scission, nous avons un parti complet, depuis les cellules jusqu’au Comité Central (CC). Nous avons gagné la majorité dans 18 organisations de masse sur 28. Dans le CC, ils étaient majoritaires, mais à tous les autres niveaux, c’est nous. Nous pensons que s’il n’y avait pas eu de déviation, la prise du pouvoir aurait été possible. Aujourd’hui, ce n’est plus possible immédiatement. Mais il faut dès maintenant préparer cette prise du pouvoir.

 

Y a-t-il eu discussions au sein du Comité Central du Parti en 2006 sur la proposition d’accord de paix ?

 

Nous étions tous d’accord pour des accords de paix, mais pour consolider puis étendre la révolution. Pour une constitution populaire et une reconnaissance de l’APL (Armée Populaire de Libération). Pas pour un abandon des armes. Même l’implication de l’ONU n’a pas fait pression pour un abandon des armes.

 

Comment le révisionnisme s’est développé au sein du parti ?

 

Le révisionnisme est une ligne politique. C’est, par exemple, la transformation d’un cessez-le-feu provisoire en accord de paix définitif alors que les objectifs de la révolution ne sont pas atteints.

 

Vous proposez une table ronde. Quelle table ronde, avec quels partis, représentant quelles classes, et comment ça va mobiliser les masses ?

 

Aujourd’hui les masses sont toujours dans la problématique de la rédaction de la constitution. Notre proposition de table ronde sera refusée. Et le peuple verra qu’il faut lutter.

 

Est-ce une tactique pour la révolution ou un compromis pour une constitution ?

 

Il y a bien quelques petits partis qui nous soutiennent. Mais les autres refuseront tout compromis. Et il y a des contradictions entre eux. Battarai dirige le gouvernement, mais les autres ne sont pas d’accord. S’il y avait un accord, c’est que nous aurions passé notre projet de constitution ! Mais, ils n’accepteront pas. Nous l’avons dit, nous, la constitution, on l’écrira à partir de la rue. A partir des besoins des masses.
Partout où des ministres participent à des manifestations publiques, ils sont accueillis avec des drapeaux noirs, des vêtements noirs, et ils sont hués. A l’université, des journalistes vêtus de noir ont été expulsés et matraqués, comme s’ils étaient des manifestants. Nous ne croyons pas à un compromis et à une constitution de compromis. Ni à une constitution réactionnaire possible. Voilà comment nous préparons les masses à révolte.
L’Etat a utilisé 8 milliards de roupies , et Prachanda en a utilisé 4, sans justificatifs. Une plainte a été déposée contre Prachanda, Battarai et Mara, auprès de la commission contre la corruption. Si Prachanda n’est plus au gouvernement, il sera convoqué par cette commission.

 

Une déclaration de l’OCML Voie Prolétarienne sur le Népal, parue dans le journal Partisan, disait : « En devenant la force politique la plus importante du pays, le PCNUm a été exposé au danger de l’opportunisme ; tous ceux qui voulaient une place, des avantages, ont été tenté de faire du parti un instrument. » Est-ce que cette affirmation est juste ?

 

Oui, c’est évident. Durant la guerre populaire, adhérer au parti, c’était combattre. Aujourd’hui, c’est aussi devenir manager, ministre, ambassadeur... Et il y a 4 ans, l’unité a été faite avec des opportunistes. Résultat : au CC, 17 membres étaient avec nous, 17 avec Prachanda, et un était neutre. Prachanda a fait cette alliance délibérément.
L’opportunisme a différentes formes, et différents niveaux. Nous parlons de néo-révisionnisme, car les paroles restent révolutionnaires. L’UML aussi avait pris les armes en 1974, puis la direction a trahi, est devenue ouvertement révisionniste, contre la révolution armée, contre la lutte des classes. Il n’y a pas de garanties contre l’opportunisme. Le seul moyen, c’est de mener la lutte. Les gens qui nous ont rejoints ne l’ont pas fait par opportunisme. Mais on sait que des opportunistes ne sont pas loin...

 

Question : Est-ce que la question de la constitution est la contradiction principale au Népal ?

 

La contradiction principale au Népal est entre les restes du féodalisme, bourgeoisie compradore, expansionnisme indien, et le peuple. Mais, pour résoudre la contradiction principale, il faut utiliser les contradictions secondaires. C’est une question de tactique.

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