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Hollande s’en va en guerre ! Pourquoi ?
Editorial de Partisan n°268 - octobre 2013
Le Président Hollande a pris depuis bientôt deux ans le parti d’un appui militaire aux rebelles syriens. Après l’attaque aux gaz de combats dans un quartier de Damas, fort probablement imputable aux forces armées du régime, il a dit nécessaire de « punir » Assad, faisant chorus avec les USA, qui aujourd’hui s’apprêtent à négocier avec le régime syrien. Bien sûr tout ce discours guerrier est fait au nom des « droits des peuples », de la lutte contre un oppresseur. Faut-il s’étonner que des « socialistes » reprennent les arguments et les attitudes belliqueuses de Sarkozy ?
Le PS vieux défenseur de l’impérialisme français
Depuis plus d’un demi-siècle, les socialistes, ceux de la SFIO et de son successeur le Parti socialiste, n’ont jamais hésité à intervenir militairement pour défendre les intérêts de l’impérialisme français ou de ses alliés. En 1947, c’est un ministre socialiste, Jules Moch, qui organise la livraison d’armes aux sionistes. Le même qui, en 1948, mobilise l’armée pour briser la longue grève des mineurs de charbon. C’est encore un premier ministre socialiste, Guy Mollet, qui en 1956 envoie en masse les jeunes Français en Algérie, pour lutter contre les patriotes algériens. A cette occasion, il confie des pouvoirs de justice et de police à l’Armée, couvrant les actes de torture. La même année, Guy Mollet intervient, avec les Anglais et Israël, contre l’Égypte, dont le président Nasser a nationalisé le canal de Suez. Nasser que Guy Mollet compare alors à Hitler. Dans les années 1980, les gouvernements de Mitterrand soutiennent Saddam Hussein contre l’Iran, lui fournissant armes, blindés et avions. Pas d’indignation alors de l’usage de gaz contre les Kurdes. Le même Mitterrand engage la France dans la coalition qui s’attaque à Saddam Hussein en 1991, pour le chasser du Koweït et préserver les approvisionnements pétroliers de l’Occident.
Rien de nouveau, alors ? Si pourtant ! Car ces actions militaires sont d’autant plus nécessaires à l’impérialisme français qu’il est économiquement affaibli face à ses concurrents. Au Mali, en terme d’investissements et de débouchés, il recule face à la Chine et à d’autres puissances. Intervenir militairement, ça ouvre des débouchés ! Et si le gouvernement français a été contraint de réduire le budget militaire, il a par contre maintenu et développé les forces d’intervention extérieure. Enfin, quelle publicité pour la vente d’armes que de voir les matériels français engagées dans des conflits, comme les Rafales en Libye !
Pourtant la France, en dépit des déclarations fracassantes de Hollande, ne peut se risquer à intervenir si les USA ne le font pas. Hollande pouvait se prévaloir de son rôle dans la pression militaire sur Assad. Mais dès que la Russie s’est opposée fermement à toute intervention et a habilement détourné la menace vers une négociation sur le contrôle des armes chimiques, exit la France. Les USA négocient avec la Russie, sans la France. Alors Hollande dit vouloir fournir directement des armes à l’ALS, l’armée syrienne libre, dont le poids dans l’opposition à Assad décline au profit des Salafistes et des Djiadistes, soutenus par l’Arabie Saoudite et le Qatar, les mêmes qui finançaient les rebelles que la France a voulu réduire au Mali.
Et la guerre de classe
L’impérialisme, c’est la guerre. Affrontements militaires, et affrontements de classes, effets différents, mais cause identique : la crise économique du capitalisme auquel l’impérialisme français fait face avec bien plus de difficultés que ses concurrents. Guerre impérialisme pour préserver ou conquérir des positions et des intérêts. Guerre de classe en France contre les exploités qu’il faut encore plus exploiter, pour sauver les profits et être plus fort (compétitif) dans la guerre économique. Attaques sur les conditions de vie et de travail, telles que l’ANI, les contrats de compétitivité dans les entreprises, la « réforme » des retraites, la réduction de l’accès à une médecine de qualité pour les exploités, ainsi que pour l’éducation. Tout cela répond à la même nécessité que les interventions militaires : sauver les intérêts de l’impérialisme français au prix des intérêts et de la vie des peuples. Les travailleurs doivent perdre leur vie à vouloir la gagner, pour le salut de leurs exploiteurs !
L’argent mis dans les interventions militaires pourrait aller aux retraites, à la santé… Oui, tout cela est vrai et explique l’impopularité d’une intervention contre la Syrie, en France comme dans la plupart des pays en crise. Toutefois, il ne s’agit pas de simplement mieux répartir une richesse. Ce n’est pas seulement une question de dosage entre des dépenses, mais de choix sociaux dictés par les intérêts de la bourgeoisie. Remarquons que Mélenchon a soutenu l’intervention en Libye, et celle au Mali, et s’est félicité d’une possible vente de Rafales à l’Inde, montrant par là que, s’il est de « gauche », il est toujours attentif aux intérêts de l’impérialisme français.
Oui, c’est la guerre, une guerre multiforme, dans laquelle nos ennemis fourbissent leurs armes. Pas seulement celles que manient les militaires et les policiers, mais encore les réformes, les lois qui imposent au nom de prétextes divers de sacrifier nos vies. Ils nous demandent de sauver les emplois en acceptant de travailler dans des conditions de vie de plus en plus pourries, de défendre le droit théorique à la retraite, en l’acceptant au rabais, de préserver notre droit à la santé, en en rendant l’accès de plus en plus difficile pour les exploités. Bref dans quelques années, on ne pourra plus nous servir l’argument que c’est parce que l’on vit plus longtemps qui faut accepter des sacrifices, car avec les conditions de travail actuelles, et un accès aux soins dégradés, l’espérance de vie dès prolétaires baissera, comme baisse déjà leur espérance de vie en bonne santé.
Rompre avec les illusions
Ils nous font la guerre ! C’est clair ! Alors il ne suffit pas d’exprimer notre légitime colère, ni de pousser de temps en temps des coups de gueule. Dans cette guerre nous reculerons tant que nous ne nous armons pas pour le combat de classe. Comment ? D’abord en s’organisant, sans attendre que quelqu’un ait balisé le chemin. Les résistants anti-nazis du début des années 1940, les combattants du FLN algérien, les Vietnamiens et les communistes chinois dans les années 1930, se sont-ils engagés sûrs des conditions et de l’échéance de leur victoire ? Pour s’engager, il faut la révolte, la colère, la conviction de la légitimité de notre combat, de nos intérêts. Il faut aussi la volonté et la conscience que le chemin, la voie des prolétaires vers leur libération, se dégage et se trace dans la lutte, collective, organisée et consciente.
Dans la lutte contre les interventions de notre impérialisme,
Dans la lutte pour faire échec à ses « réformes ».
Pour cela, il nous faut rompre avec l’illusion d’un capitalisme à visage humain, avec l’illusion d’un impérialisme sans guerre, avec les illusions que sèment tous les partis de gauche réformistes. C’est notre ambition à Voie prolétarienne. « Il n’est pas de sauveur suprême ». C’est en organisant en Parti communiste notre colère et nos refus, que nous tracerons le chemin de la libération des exploités.