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Nos tâches internationalistes

Partisan N°270 - Décembre 2013

Intervention de l’OCML-VP au forum du 10 novembre 2013

Pour répondre à la question discutée ce matin : « Contre l’impérialisme, avec qui lutter et comment s’organiser ? », en tant que militants de Voie Prolétarienne, nous devons prendre en considération que nous luttons au sein d’une France impérialiste.

 

Dans le système impérialiste mondial, la France n’occupe plus la place centrale qu’elle avait il y a un siècle. Mais son passé colonial, comme son rôle présent, marquent la conscience des peuples dominés. Les guerres coloniales, leurs massacres, l’exploitation économique des peuples colonisés et dominés sont autant d’expériences qui ont creusé la méfiance des peuples anciennement colonisés envers des travailleurs français. En France, cette méfiance est encore vive entre les travailleurs de France. Elle reste facteur de division entre vieux français et descendants d’immigrés.
Cette méfiance est d’autant plus forte que par le passé, les travailleurs français et leurs organisations n’ont pas soutenu leurs luttes d’émancipation. Il faut se rappeler leur passivité pendant la guerre de libération nationale du peuple algérien, et après les massacres du 17 octobre 1961 à Paris.
Aujourd’hui, les discours, de droite comme de gauche, sur la défense de la grandeur et des intérêts de la France, « des droits de l’homme », sur l’identité nationale, alimentent les idéologies réactionnaires, le racisme, le chauvinisme. Tout cela entretient la division de notre classe.
Hollande veut faire de la commémoration de la première guerre mondiale, une grande mobilisation patriotique dans la guerre économique mondiale.

 

En effet, la France impérialiste est sur le déclin, en Europe et dans le monde.
- En déclin économique et politique face à ses concurrents anciens ou nouveaux comme la Chine en Afrique.
- Face à ces concurrents, l’impérialisme français cherche à préserver ou à reconquérir par des aventures militaires, les positions économiques qu’il perd. Il est donc plus agressif et une menace pour les peuples du monde.

 

Voilà pourquoi, la France est intervenue militairement en Libye et au Mali. Et pourquoi, Hollande a fait campagne vainement pour une intervention directe en Syrie, où son gouvernement continue de soutenir les forces réactionnaires qui ont détourné la révolte légitime du peuple syrien, au bénéfice des impérialistes occidentaux.

 

Rien de surprenant. Le PS, a toujours été un défenseur vigilant de l’impérialisme français.
- Il a été le partisan d’une colonisation « civilisatrice ». Sous Mitterrand, en 1994, l’armée français, a couvert les massacres au Rwanda. Le PS est encore et toujours un soutien indéfectible de la colonisation sioniste de la Palestine.
- Il a armé les sionistes en 1947. Au gouvernement en 1956, il est intervenu avec les forces sionistes contre l’Égypte qui avait nationalisé le canal de Suez. Depuis, il a toujours développé une coopération multiforme avec les sionistes. Il soutient les accords d’Oslo et le « processus de paix », qui n’est que la couverture de la poursuite de la colonisation de la Palestine.

 

Communistes d’un pays impérialiste, nous ne pouvons vaincre sans l’unité révolutionnaire des prolétaires du monde contre l’impérialisme.

 

Nous savons aussi que tant que notre impérialisme exploitera et dominera des peuples, tant qu’il pourra tromper en justifiant guerre et agression au nom des « droits de l’homme », il restera fort.
- Il pourra diviser et affaiblir la classe ouvrière de France, en s’appuyant sur une frange de travailleurs matériellement et idéologiquement corrompue, l’aristocratie et la bureaucratie ouvrières, qui bien que déstabilisées par la crise, sont encore à la tête des directions confédérales syndicales.
- Ces réformistes sont les agents de la bourgeoisie dans notre classe, où ils défendent le produisons français et acceptent la logique capitaliste, de concurrence et de guerre économique, qui nous écrase et nous conduit au chômage.

 

Pour nous, en tant que communistes en France, la lutte sans concession contre notre propre impérialisme, et contre ceux qui en défendent les intérêts parmi nous, sont les conditions nécessaires de l’union internationale des prolétaires.
- En effet, pourquoi les peuples et les révolutionnaires des pays dominés croiraient à nos déclarations d’internationalisme, de solidarité, d’appel à la lutte contre un ennemi commun, si nous laissions agir sans le combattre notre propre impérialisme ?
- Si nous défendions les intérêts de la France impérialiste, comme l’a fait Melenchon qui se félicitait de la vente d’avions Rafale à l’Inde, les révolutionnaires indiens pourraient-ils croire à notre sincérité ?
C’est pourquoi, à Voie Prolétarienne, nous avons toujours fait de la lutte contre notre propre impérialisme une tâche essentielle.
- Notre organisation a dénoncé et combattu la participation de la France, de ses armées, aux interventions de maintien de l’ordre impérialiste, que ce soit en Irak, en Afghanistan, en Libye et au Mali. Nous avons toujours dénoncé les justifications mensongères de ces interventions et le discours des « droits de l’homme ». Les motivations humanitaires, le droit international, qui servent à les justifier, sont oubliées, lorsqu’il s’agit de faire des affaires avec la Libye, l’Irak ou la Syrie, ou de défendre l’occupation sioniste de la Palestine.
- Contre l’impérialisme, notre organisation s’est toujours affirmée pour le droit à l’autodétermination des peuples qui, malgré la dislocation de l’empire colonial français, sont encore sous domination de la France (Antilles, Réunion, Kanaky).
- Notre soutien à l’autodétermination des peuples ne peut en rester à l’indépendance politique. Qui reste très limitée quand se maintient la domination économique. Aussi nous sommes pour le droit des peuples des pays dominés et des autres à exproprier sans indemnité les filiales étrangères des entreprises françaises qui exploitent leurs ressources naturelles ou humaines. Nous affirmons le droit des pays étranglés par les dettes contractées par leurs bourgeoisies auprès des banques françaises à les annuler unilatéralement, que ce soit en Grèce, en Afrique ou ailleurs.
- Ainsi, nous combattons tous les mots d’ordre chauvins, qui associent les intérêts des travailleurs de France à ceux de nos exploiteurs. Les appels au « patriotisme économique ». Nous combattions le « produisons français » du PCF. Nous combattons encore ses versions modernisées du Front de gauche, et la préférence nationale que le FN n’est pas seul à défendre.
- Enfin, nous refusons de subordonner la régularisation de nos camarades sans papiers aux besoins de l’économie française, et défendons la liberté de circulation et d’installation des exploités.

 

Mais l’anti-impérialisme a reculé en France. Il a reculé car avec le désarroi politique, aggravé par la crise. En l’absence d’organisation communiste et internationaliste forte des travailleurs, les « buts criminels » des impérialistes sont plus facilement camouflés par des prétextes dits « nobles », droits de l’homme, droit des femmes, démocratie.
- Les hommes de la bourgeoisie, ses intellectuels, les médias, manipulent la légitime indignation des travailleurs face aux massacres en Syrie ou ailleurs, pour justifier les interventions impérialistes en Syrie ou ailleurs. Mais l’indignation de la bourgeoise est sélective, elle dépend de ses intérêts, non de ceux des peuples. Silence en 1994 pendant le génocide au Rwanda, silence pendant l’opération plomb durci contre Gaza…
- De plus, l’ennemi d’aujourd’hui a été l’ami d’hier. Kadhafi et Assad n’étaient pas moins oppresseurs de leur peuple quand ils ont été reçus en grande pompe par Sarkozy.
- L’impérialisme n’a pas d’ami, ni de principe humanitaire, seulement des intérêts. Et les contrats juteux sont payés par le sang des exploités.
- Seule la solidarité des exploités est réelle parce que nos intérêts fondamentaux sont les mêmes.

 

Toutefois, la tâche des communistes ne se limite pas à être des anti-impérialistes, refusant la moindre compromission avec leur bourgeoisie.
Nous sommes pour la libération politique et sociale des exploités. Cette libération passent par la liquidation du capitalisme et de l’impérialisme qui en est sa forme actuelle. Nous sommes donc pour l’unité internationale des exploités. Notre tâche est donc double.
- Nous souhaitons l’échec ou la défaite de notre impérialisme dans ses actions économiques, militaires, qui visent au maintien de ses positions dominantes. C’est là notre tâche principale en tant qu’appartenant à un pays impérialiste.
- Mais, comme communistes, nous souhaitons la victoire des exploités, des travailleurs, non seulement contre l’impérialisme, mais encore contre leur classe dominante et exploiteuse directe.
Communistes nous ne disons pas que « l’ennemi de notre ennemi est nécessairement notre ami ».
- L’ennemi de notre ennemi n’est notre allié que s’il poursuit des buts qui ne s’opposent pas à la libération des exploités.
- Si nous souhaitons l’échec des impérialismes occidentaux en Syrie, nous ne disons pas que leurs adversaires russes ou chinois et le régime d’Assad mènent un combat dans l’intérêt des peuples.
- Nous combattons donc notre impérialisme sans soutenir ses ennemis impérialistes ou réactionnaires.

 

Notre soutien positif va aux organisations, aux militants, communistes ou progressistes, qui défendent les aspirations des peuples à la liberté, à l’émancipation sociale, qui défendent l’égalité entre les hommes et les femmes, reconnaissent les droits des minorités nationales à l’autodétermination, et n’attendent pas leur victoire des impérialistes.
- En 2002, lors de l’intervention impérialiste en Afghanistan, nous avons soutenu, et invité en France, l’Organisation révolutionnaire des femmes d’Afghanistan (RAWA). Parce que cette organisation défendait non seulement les droits des Afghanes, mais s’opposait aussi aux interventions impérialistes, à la réaction des Talibans et aux chefs de guerre. Affirmant que la libération du peuple afghan ne pouvait dépendre que de sa lutte indépendante, et ne cherchait pas l’appui des impérialistes.
- Aujourd’hui, pour les mêmes raisons, nous nous sommes engagés dans la campagne pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah, communiste libanais, maintenu en prison, au delà de sa peine, pour avoir combattu l’impérialisme, et être resté fidèle à ses engagements anti-impérialistes et anti-sionistes.
Notre soutien va donc aux organisations communistes engagées dans des luttes nationales ou démocratiques, dans lesquelles ils peuvent faire front avec des forces bourgeoises.
- Nous les soutenons, eux, et pas leurs alliés de circonstance.
- Nous les soutenons parce que l’avenir de la révolution dans leur pays et plus largement dépend de leur force politique et organisationnelle, de leur capacité à diriger les fronts dans lesquels ils sont engagés, auquel le soutien internationaliste peut contribuer.
- L’issu progressiste de toute lutte anti-impérialiste dépend de la capacité des communistes, de leurs partis, à se placer à sa tête. Ils ne le peuvent que s’ils créent les moyens politiques, militaires et organisationnels de leur indépendance, comme avait su le faire, par exemple, avec succès le Parti communiste chinois contre les Japonais. C’est pour cela que notre appui va d’abord aux communistes.
- En Palestine, nous avons dénoncé les accords d’Oslo de 1993 et la capitulation de l’OLP. Nous soutenons les militants communistes comme Georges Abdallah, les organisations progressistes comme le FPLP, qui se sont opposées à eux, mais pas le Hamas, qui, bien que luttant contre le sionisme, combat ces militants.

 

Ce soutien en positif aux forces progressistes ou révolutionnaires dans le monde permet de combattre ici la fausse l’alternative que la bourgeoisie pose : soit la démocratie bourgeoise imposée par l’impérialisme, soit l’obscurantisme réactionnaire.
La bourgeoisie veut ainsi cultiver le fatalisme, imposer sa voie, contre la voie de la libération des prolétaires.
- Les luttes des forces progressistes et révolutionnaires dans les pays dominés sont un soutien et un appui à la lutte de classe dans notre pays. Elles montrent qu’une voie révolutionnaire est possible, que l’alternative n’est pas entre « la démocratie imposée par l’impérialisme » et « obscurantisme, religieux ou nationaliste ».
- Elles nous permettent de nous opposer à la propagande fataliste de la bourgeoisie, au chauvinisme ou à la résignation qui frappent nombre de travailleurs.
- Ces luttes, que ce soit celles des peuples arabes, celles des maoïstes Indiens ou népalais, ou de celles nos camarades philippins, sont des points d’appui enthousiasmants pour nous, dans la construction d’une organisation communiste implantée dans le prolétariat de France.
Sans une organisation internationaliste et anti-impérialiste, malgré les révoltes et les colères qui éclatent, rien de durable ne peut être gagné.
Sans une organisation communiste, aucun pas important ne peut être fait dans la voie de l’émancipation des exploités et des opprimés, dans leur union internationale.

Prolétaires de tous les pays, peuples des pays dominés, unissons nous !

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