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Equateur : on a raison de se révolter !

Partisan Magazine N°14 - Décembre 2019

La révolte d’octobre 2019

Les causes de la révolte sont connues : un ensemble de mesures (« paquetazo ») mises en place par le président Lenin Moreno à la demande du FMI, en échange d’un prêt de l’institution internationale, un plan d’ajustement structurel supplémentaire.
La cause, du point de vue du capitalisme, est aussi connue : l’effondrement des cours du pétrole à partir de 2014 (l’Equateur est un pays producteur, membre de l’OPEP), renforcé par l’effet catastrophique du séisme destructeur de 2016, sans compter la corruption qui a dévasté le pays pendant des années.

Le contenu du « paquetazo », c’est une série de mesures choc : suppression des subventions aux combustibles, d’où hausse de 60 à 75% des prix du carburant, et quasi doublement du prix du ticket de bus. Flexibilisation du travail : - 20% sur la rémunération des contrats précaires, flexibilité des 40 heures hebdomadaires, réduction des congés de 30 à 15 jours dans la fonction publique, les travailleurs des entreprises publiques donneront chaque mois un jour de travail gratuit.

La réponse ne s’est pas fait attendre : douze jours de révolte et de soulèvement, plus de 1300 routes bloquées, le blocage des villes par des barrages enflammés et des affrontements permanents avec les forces policières, six préfectures prises d’assaut, 26 postes de police détruits, une répression féroce avec au moins 11 morts et plus de 2000 blessés, une marche des communautés indiennes sur la capitale Quito, la fuite du gouvernement à Guayaquil (le grand port sur le Pacifique), et finalement contraint de reculer partiellement.

Après négociation avec les organisations indiennes regroupées dans la CONAIE (voir plus loin), le gouvernement annonce le retrait du décret 883 qui supprime la subvention aux combustibles et donc la hausse de leur prix, tout en annonçant vouloir « procéder immédiatement à l’élaboration d’un nouveau décret exécutif qui permette une politique de subventions aux carburants, avec une approche intégrée, avec des critères de rationalisation, de ciblage et de sectorisation, afin de s’assurer qu’elles ne sont pas destinées à des personnes disposant de ressources économiques plus importantes ou à des trafiquants de carburant » (article 2 du décret 894 du 14 octobre). Autrement dit, la vigilance s’impose pour l’avenir et le risque de coups fourrés une fois le mouvement arrêté est important.

Par ailleurs, rien n’est dit sur l’industrie minière qui devait être en discussion, et les mesures de flexibilité (diminution de la surtaxe sur les contrats précaires, flexibilité des 40 heures hebdomadaires) ont été validées lors d’une rencontre de négociation le 23 octobre. Quant aux contributions des travailleurs du secteur public (diminution des congés, journée de travail gratuite) elles sont toujours « en cours d’analyse » à l’heure où nous écrivons.
Crier victoire totale est donc pour le moins exagéré, même si le soulèvement a fait reculer le gouvernement sur la mesure la plus emblématique.

Les images spectaculaires du soulèvement ont fait le tour des réseaux sociaux, et ont provoqué bien des fantasmes chez les adeptes de la violence comme critère essentiel d’une politique révolutionnaire… C’est mal connaître l’Equateur et l’Amérique Latine, et plaquer des schémas bien « de chez nous » sur une situation en fait très différente.

(...)

La suite et l’article complet du magazine en téléchargement au format pdf ci-contre

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