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Plus d’un an de lutte : interview d’un Gilet Jaune

Partisan Magazine N°14 - Décembre 2019

Quoi de neuf, de faux, de périmé, dans l’article du magazine n°13 de mai 2019 ?

Déjà c’est important de dire d’où je parle. Je suis né dans une périphérie rurale ouvrière en cours de désindustrialisation, et actuellement je bosse dans un bahut du 93. Je suis à la CGT, militant antifasciste et sympathisant des idées marxistes-léninistes depuis des années. Lors de l’acte 1 du 17 novembre, j’étais dans ma région d’origine et j’ai vu que les personnes de mon entourage qui participaient au mouvement ou qui s’y reconnaissaient n’étaient pas du tout des fascistes, mais des prolétaires qui n’étaient pas, ou mal, représenté-e-s par les syndicats : précaires, femmes isolées, personnes handicapées… En remontant dans la région parisienne, j’ai été frappé par les réactions de défiance voir de mépris élitiste dans pas mal de milieux militants que je fréquentais alors. Il y avait un truc qui n’allait pas dans ces réactions : on ne peut pas faire la révolution sans qu’une masse importante de la population ne vienne sur des positions révolutionnaires, et dans ce cas il faut accepter que cette masse soit au départ influencée par l’idéologie dominante, ou bien rester dans sa vision statique du monde et renoncer à faire la révolution.

De ce point de vue, l’article de Partisan est assez juste, mais il a été écrit le 29 janvier, deux mois et demi après le début du mouvement, et je pense qu’il venait corriger des textes antérieurs de l’organisation sur le mouvement des GJ, qui étaient moins bienveillants. La plupart des organisations ont fait ça. Le texte est juste quand il souligne que les groupes d’extrême-gauche qui ont attaqué les GJ (genre Mouvement Communiste et Des Nouvelles du Front) et ceux qui ont rejoint le mouvement tombaient finalement d’accord sur un point : le syndicalisme et l’économisme. Pendant que les groupes plus sectaires jugeaient le mouvement irrécupérable, les groupes opportunistes de type NPA et LO ont essayé de ramener le mouvement sur des mots d’ordres syndicaux alors qu’il portait la promesse d’une critique de l’État et de tous les aspects de la vie. A partir de là, le texte propose un plan de travail, des axes d’interventions qui ont le mérite d’exister, même si je pense que ça va prendre encore des années pour les vérifier dans la pratique.

La base sociale des GJ entre le début et la fin du mouvement, est-ce la même ?

Contrairement à ce que l’on entend, il y a encore des gilets jaunes qui occupent régulièrement des ronds-points à la campagne, j’en ai rencontré beaucoup début juillet à l’assemblée des assemblées de Montceau-les-Mines. Ils/elles ont été chassé-e-s par la police en janvier mais certain-e-s sont revenu-e-s, moins pour bloquer les routes que pour se retrouver et se rendre visibles. De ce que je sais, il y a eu beaucoup de contradictions sur les ronds-points en novembre-décembre. Il y a eu des engueulades et des bastons entre fachos et pas fachos, des problèmes d’alcool, d’égos…
Sur les manifs à Paris, il y a nettement moins de monde qui vient des périphéries rurales lointaines qu’au début. Maintenant, c’est plutôt la grande et petite banlieue. De fin novembre à début janvier, on vivait dans l’idée que c’était l’insurrection qui était arrivée, avec ce qui se passait sur les Champs Élysées, le transpalette dans le ministère de Griveaux.
En janvier beaucoup de personnes nouvelles sont arrivées parce qu’elles avaient vu que Macron avait canné en décembre et lâché plein de thunes. C’est là que les profs, les travailleur/euse-s sociaux/ales, les animateur/trice-s culturel-le-s sont arrivé-e-s. Les ronds-points ont été détruits un peu partout, mais d’un autre côté les manifs parisiennes ont pris un caractère massif de janvier à avril, plus que les deux premiers mois.
C’est sûr que beaucoup de gens ont baissé les bras depuis le printemps, mais pas tout le monde. Par exemple, pour la manif pour Adama Traoré en juillet, il y avait une délégation de cinq à dix ardennai-se-s, qui étaient venus à Beaumont-sur-Oise avec une grande banderole "Nous faisons plus que participer à une lutte, nous faisons l’histoire".
Depuis le printemps, on voit moins de drapeaux régionaux dans les manifs parisiennes, mais il y a des manifs tournantes de ville en ville qui ramènent à chaque fois pas mal de monde des autres régions, avec des réseaux d’hébergeant-e-s qui se constituent. On entend moins que la France entière va débouler à Paris et prendre l’Elysée. L’idée c’est plus de ne pas lâcher en attendant que vienne la convergence des luttes. Je ne vois plus de petits patrons sur Paris depuis longtemps. Ce n’est pas marqué sur les visages, mais ça fait une éternité que je n’ai pas parlé avec un-e petit-e patron-ne. Celles et ceux qui restent dans le mouvement sont peut-être pour beaucoup des petit-e-s bourgeoi-se-s avec des idées réformistes ou réactionnaires, mais en tout cas ils rejettent le légalisme. Ils ne rejettent plus par principe la violence ; ça ne veut pas forcément dire être violent-e soi-même, ça veut dire refuser de se désolidariser de celles et ceux qui utilisent la violence contre des vitrines, ou qui résistent à la police. Au début beaucoup de personnes pensaient que la police allait se solidariser avec nous, certains attendaient même l’armée pour sauver le peuple. Ces gens-là ont progressivement disparu ou ont évolué. En décembre, on entendait "la Police avec nous", maintenant quand ils arrivent c’est "les putes à Macron". Je hais ce slogan : il est sexiste, viriliste, insultant pour les personnes prostitué-e-s. Maintenant, si tu le décortiques, tu y vois un genre d’amour déçu de la police, comme si les personnes qui crient ça avaient cru sincèrement au départ que la police allait protéger le peuple contre Macron, et se sentent abandonnées.

Quelle évolution par rapport au racisme, aux LGBTphobies, à la présence de l’extrême droite ?

Sur les ronds-points, c’était différent d’un coin à un autre. En Picardie, dans l’Ain, dans le sud des Ardennes on a vu au départ des ronds-points tenus des racistes, des réactionnaires. Ils/elles ont commis des agressions. Je ne dis pas que c’était toute la Picardie ou tout l’Ain, c’était des poches où ces idées-là étaient dominantes. A Saint Étienne dès les premières semaines, j’ai vu l’inverse.
Les banderoles anti migrants sont devenues rapidement quelque chose d’impossible sur Paris. Cela ne veut pas dire que d’autres idées réactionnaires, homophobes, antisémites puissent s’exprimer dans une certaine impunité. La semaine de la Pride, je n’étais pas sur Paris, mais il paraît qu’une banderole bien malsaine à été déployée à propos de Schiappa,.
Plus récemment, le 26 octobre, on a fait l’acte 50 avec la diaspora chilienne à Paris et on est passé devant la fondation Rothschild. Des fascistes organisés ont essayé de provoquer un esclandre et pas mal de monde les a suivis. Parfois, des gens viennent avec des pancartes avec des allusions à la franc-maçonnerie ou aux banquiers juifs qui soi-disant dirigeraient le monde. Dès le début, il y a eu des personnes racisées sur les manifs, des Noir-e-s et des Arabes. Celles et ceux qui font des banderoles sur les musulman-e-s ou sur les migrant-e-s se font virer des manifestations parisiennes comme diviseur/euse-s. Il y a un consensus là-dessus. Il n’y a pas de consensus pour virer les personnes qui tiennent des propos transphobes, homophobes, antiféministes ou antisémites. Mais, en général, ça prend une forme vicieuse : on n’attaque pas les Juif/ve-s mais on cible de façon répétitive BHL ou Finkelkraut, on n’attaque pas les féministes mais on cible de façon répétitive Schiappa, etc. Macron en a joué en se posant dès le départ en défenseur des minorités contre la "foule haineuse", en dénonçant des risques de pogroms, en envoyant Schiappa en première ligne. Il y a eu des gens pour tomber dans son piège, mais on ne manipule jamais que des personnes manipulables.

On ne voit plus l’extrême droite sous sa forme organisée. La plupart des militant-e-s comme Benedetti ou Vincent Lapierre, l’Action Française, l’Œuvre Française, les Zouaves, ont été identifiés et chassés, même s’il y a encore des tentatives de revenir, comme lors de l’incident de la fondation Rothschild, qui était clairement une provocation préparée, mais qui a fini par faire pschitt. Au début du mouvement, Soral et Dieudonné, qui sont des businessmen avisés, ont vendu des gilets jaunes très chers avec des croix catholiques ou des ananas, et tu en croise encore en manif, comme quoi il y a des gens qui ont de l’argent à jeter par les fenêtre et qui continuent de croire sans vergogne en ces gens-là.
Dans le village ouvrier où j’ai grandi, puis dans les quartiers populaires où j’ai vécu l’autre moitié de ma vie, j’ai vu comment le discours complotiste captait ses proies. Le discours complotiste est souvent repris par des petit-e-s artisan-e-s et des chômeurs. Les un-e-s comme les autres ont l’impression qu’on leur fait les poches. C’est une impression juste et fondée. Sauf que pour les un-e-s tout va aux "assisté-e-s" via l’URSSAF, pour les autres tout va aux banquiers via la TVA. C’est un discours de gens qui ne sont pas confronté-e-s à l’exploiteur direct, mais à l’Etat (via l’URSSAF, la CAF ou Pôle Emploi). Mais ce discours a une influence dans la classe ouvrière qui l’entend dans les villages et les quartiers où elle habite. Un des ressorts idéologiques des complotistes, c’est d’expliquer que l’extrême-gauche et les syndicats sont des leurres au service du système, et qu’il faut les fuir comme la peste. C’est pour cela que la montée de la lutte de classe et de masse permet de faire reculer ce discours, parce que celles et ceux qui croient au complot peuvent descendre dans la rue, y croiser des gauchistes et des syndicalistes en chair et en os, leur parler, voir que ce ne sont pas des aliens ou des illuminati, pendant que leurs gourous restent, eux, dans leur tour d’ivoire. Cela dit ce discours a fait des dégâts depuis 15 ans. Il a des racines dans les cerveaux depuis la Révolution Française (Barruel, De Maistre), et ce n’est pas un an de manifs qui va le faire disparaître. Les complotistes ont une étendue idéologique plus importante que le nombre de leurs militants. Ce n’est plus un obstacle organisationnel, mais plutôt idéologique.

Le refus de s’organiser, ça veut dire quoi ?

Pour beaucoup de personnes, le clivage base/sommet est plus fort que le clivage droite/gauche. Les Assemblées tenues par l’extrême gauche refusent le RIC par principe. Pour les militant-e-s, ce n’est pas la démocratie formelle qui crée l’autonomie de classe, mais le niveau de conscience. Et sans conscience, les opprimé-e-s votent contre leurs propres intérêts. Beaucoup de gilets jaunes rejettent violemment ce type d’arguments, comme une insulte à leur intelligence. Pour eux les partis de droite ou de gauche, voire d’extrême-gauche, sont des expert-e-s qui ont confisqué la parole populaire. Ces partis politiques sont accusés de vivre grassement de l’argent versé par l’État. Cela peut nourrir les "tous pourris".
Il y a une contradiction entre les artisans ou les chômeurs pour savoir s’il faut plus ou moins d’État. Dans le mouvement, il y a aussi beaucoup de personnes ayant un handicap qui survivent de plus en plus mal avec des minimas sociaux. Ils/elles ne demandent pas moins d’impôt, ils/elles demandent la "justice fiscale" pour sortir de la survie.

Il y a un consensus vague autour de l’écologie. Tout le monde a à peu près compris la manœuvre de division de Macron quand il a opposé fin du monde et fin de mois pour se poser en médiateur entre les manifs GJ et les manifs climat. Après, le débat sur l’écologie est souvent superficiel, les seul-e-s que j’ai vu s’opposer dans le 93, ce sont des conspirationnistes qui expliquent que l’écologie est un complot de la fondation Soros, et des militant-e-s du Parti Ouvrier Indépendant qui disent que c’est un dérivatif qui nous éloigne de la lutte des classes, de la défense des 34 968 communes et des 42 régimes de retraites.

Quel est l’intérêt des Assemblées des Assemblées ?

Il y a eu des Assemblées des Assemblées à Commercy, Saint Nazaire, Montceau-les-Mines. Il y a des tensions pour la prochaine à Montpellier, qui semble phagocytée par un cartel d’ambitieux/se (plutôt lié-e-s au PS et à EELV d’après les infos qui circulent). De toute façon, les gens qui continuent à y aller attendent de moins en moins que des réponses sortent des débats. Ils cherchent surtout maintenir la dynamique.
J’ai fait celle de Montceau en juillet. Il y a quand même eu entre 600 et 800 délégué-e-s. Plus 200 personnes qui n’ont pas participé aux débats, qui sont restées dehors à discuter et qui sont ressorti-e-s de là souvent moins frustré-e-s que les délégué-e-s.. C’était largement organisé par des membres du club de moto, qui savent faire de l’événementiel et qui ont servi de support aux prolétaires du coin pour gérer l’accueil et la restauration de tout le monde. Grosse réussite de ce point de vue. Par contre, ce qui est sorti des débats a déçu beaucoup de monde. Montceau a confirmé ce qui avait déjà été voté à Saint-Nazaire, à savoir qu’on devait sortir du capitalisme, mais sans préciser comment, ni d’ailleurs ce qu’on entendait par capitalisme. Beaucoup de gens sont mandaté-e-s pour des Assemblées locales. Dans les villes ce sont souvent des personnes qui parlent bien, mais qui ne respectent pas leur mandat et viennent pour avancer les positions de leurs organisations, comme le POI qui met ses gros sabots, ou le NPA qui fait les choses plus subtilement. Les partisans de l’UPR d’Asselineau sont présent-e-s, mais ce ne sont pas des militant-e-s rompu-e-s aux manœuvres d’appareil et à la prise de parole publique, ils savent surtout relayer des vidéos.
Avant le débat sur le capitalisme, il y avait quelques complotistes qui voulaient présenter une motion de soutien à Chouard (un texte bien fourbe qui expliquait que, même si Chouard est pro-négationniste, ce n’était pas important pour l’instant qu’il est pour le RIC), mais quand ils ont vu la violence des débats autour du capitalisme, ils ont remis leur motion dans leur poche.

Je devais faire la synthèse du débat sur le capitalisme et c’était mission impossible. En gros, il y avait un tiers de proudhonien-ne-s (conscient-e-s où inconscient-e-s) qui voulaient sortir du capitalisme par les coopératives. Un tiers de réformistes qui voulaient sortir du capitalisme par les nationalisations. Et les "communs", un hippie et un curé, qui voulaient sortir du capitalisme par la charité. Et le reste qui voulait une révolution armée, avec des contours plus ou moins flous.

Et les manifestations, et l’autonomie des femmes GJ ?

En tant que mec cisgenre [1], je ne suis pas légitime à répondre à cette question, le mieux serait de le leur demander. Je peux dire que c’est un mouvement où il y a eu d’entrée de jeu beaucoup de femmes, car ce sont elles qui sont souvent impactées par la précarité, ce sont elles qui ont la charge mentale du ménage et doivent gérer le budget de la famille face à la baisse du pouvoir d’achat (il y a aussi beaucoup de mères isolées dans le mouvement). De plus, de par l’éducation genrée, elles sont souvent dans l’action plutôt que dans les discours, et donc ce sont souvent elles qui ont géré les tâches d’organisation du quotidien sur les ronds-points. Ca, c’est le point de départ, mais elles n’en sont pas restées là. Le mouvement a permis à beaucoup de femmes qui se sentaient isolées dans leur combat quotidien de se reconnaître en tant que collectif. Il y a des réunions des femmes GJ, des réunions et des assemblées en non mixité. Il y a eu des interventions dans des manifestations sur des questions d’oppression spécifique : au rassemblement d’octobre sur les féminicides par exemple, il y avait la banderole " Femmes précaires, femmes en guerre", portées par des femmes qui étaient venues au militantisme féministe par le mouvement des GJ. Elles sont plus nombreuses en proportion que dans le syndicalisme et l’extrême gauche classique.

Les actions communes avec le comité Adama Traoré, avec XR ? Comment se construit l’unité ?

Depuis la troisième journée de mobilisation parisienne des GJ, le 1er décembre 2018, où ils ont participé au cortège de GJ antifascistes impulsé par Sud cheminots, de la Gare Saint-Lazare vers les Champs-Elysées, le Comité Adama Traoré a été très présent dans le mouvement. Sur Paris, mais aussi au-delà, des GJ sont venus des périphéries rurales pour le débat GJ/quartiers populaires à la Bourse du travail de Saint-Denis en février, ou à la manif pour Adama de juillet. Les GJ découvrent une violence policière que les gens des quartiers populaires subissent depuis toujours. Ça parle à beaucoup de monde, les groupes fascistes organisés sont devenus invisibles sur les cortèges, le collectif Adama est devenu un collectif dont la présence est légitime. Pendant deux manifs, on s’est flairé, puis on s’est accepté mutuellement, on remercie la police avec toute sa violence d’avoir aidé à la convergence.
Avec XR (Extinction Rébellion), ça a été super intéressant de participer à une action commune avec des assemblées de GJ, Cerveaux non disponibles, le Comité Adama et le Collectif de Libération et d’Autonomie Queer (CLAQ) qui pose la question de la lutte contre l’hétérosexisme dans le cadre de la lutte anticapitaliste. Le 1er décembre, des camarades de ce collectif avaient déjà fait un bloc à la manif Saint-Lazare-Champs Élysée, et c’était très important qu’ils/elles soient là. Les relations avec XR sont un peu particulières ; ça c’est bien passé à Italie 2 le 5 octobre, mais ils se sont mis à flipper à Châtelet quand ils ont vu des GJ avec des bières. Ce n’était pas l’image qu’ils voulaient donner aux médias, une image de respectabilité petite-bourgeoise. S’ils ont pu s’installer pendant 8 jours et bloquer la place sans susciter de réaction du gouvernement pourtant habitué à la violence policière très dure contre les GJ et les jeunes des banlieues, c’est bien grâce ou à cause de cette respectabilité petite bourgeoise.

Il manque une fin. Si tu peux te lancer ?

Il n’y a pas de fin, parce que le mouvement n’est pas fini. D’un côté pour Macron comme pour Le Pen, la messe est dite : le bilan du mouvement ce serait la montée des scores du RN aux élections européennes. En réalité je pense que, comme pour 68, il faudra une dizaine d’années pour faire le bilan des GJ, des dizaines de milliers de personnes ont participé de près ou de loin au mouvement. Pour beaucoup, même pour des gens qui avaient 40 ou 50 ans, c’était une première expérience militante. Tout cela s’inscrit dans plusieurs contextes : depuis la crise de 2008, il y a des soulèvements populaires un peu partout dans le monde, autour de la cherté de la vie et de l’indifférence des élites. Ces mouvements sont interclassistes, sans direction prolétarienne, avec parfois des composantes réactionnaires importantes, qui cherchent à tirer les marrons du feu. En France, il y a une radicalisation des formes de luttes (la bourgeoisie parle parfois de "zadisation" des luttes) depuis la réforme de 2010 sur les retraites, en passant par la loi Travail. Il y a aussi une volonté de poser (même mal ou superficiellement) la question du capitalisme, alors que le mot était devenu tabou dans les années 90-2000. Ce mouvement a semé des graines dans les consciences, on verra dans quelques années quelle gueule aura la récolte.

[1Cisgenre : dont l’identité de genre correspond au sexe biologique qui lui a été assigné à la naissance. Autrement dit : la vaste majorité du commun des mortels qui n’est pas passée à travers les souffrances et les obstacles que vivent les personnes trans.

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