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Guadeloupe et DOM : Images et leçons

Partisan N°225 - Février 2009

On peut se focaliser sur la Guadeloupe et la Martinique, mais le premier mouvement et la première victoire ont eu lieu en Guyane, sans oublier la grève à la Réunion au mois de novembre. Le mouvement des DOM a fait éclater aux yeux de tous en France, sur la place publique des médias, la situation de pays dominés des « confettis de l’empire ».

La bourgeoisie

Canal Plus, 6 février. La déclaration du bourgeois béké Alain Huygues-Despointes a fait scandale, elle mérite d’être dans Partisan : « Dans les familles métissées, les enfants sont de couleurs différentes, il n’y a pas d’harmonie. Moi, je ne trouve pas ça bien. Nous, on a voulu préserver la race. »
La division en classes se double d’une division de type national. La grande bourgeoisie est l’héritière directe des anciens esclavagistes. La transformation des colonies en « départements d’outre-mer » en 1946 a été un changement administratif, ça n’a pas changé la réalité économique et sociale. Même s’ils se sont adaptés, diversifiés, passant des plantations à la grande distribution et du rhum au pétrole, les békés (0,5% de la population) n’ont abandonné ni leur racisme, ni leur habitude d’être au-dessus des lois, y compris celles du marché. « Les pétroliers s’entendent entre eux, préfèrent payer une amende plutôt que de déposer leurs comptes annuels. » (1).
Les grands commis de l’Etat, comme les renforts de gendarmerie, viennent de métropole. La tutelle politique est située à 7000 kms. Et l’économie est elle aussi dépendante, pour le plus grand profit des importateurs. La Guadeloupe, pays au climat favorable s’il en est, importe plus de 10 000 tonnes de fruits et légumes par an...

Les prolétaires

Tout au long de ces dernières années, les ouvriers, les paysans, les employés de différents secteurs, les petits fonctionnaires ont déclenché des actions de masse (grèves, manifestations, etc…) contre le renforcement de l’exploitation de la classe des capitalistes, la classe des propriétaires fonciers et de l’Etat qui est à leur service. La classe des capitalistes et la classe des propriétaires fonciers ont toujours utilisé une double tactique (d’une part les mensonges, les manœuvres de division et de corruption, d’autre part la répression armée) pour briser la juste lutte des travailleurs. Les travailleurs ont certes remporté quelques succès dans leur lutte, mais ils ont essuyé aussi beaucoup d’échecs. Les ouvriers, les paysans et les autres travailleurs n’avaient pas une conscience de classe assez élevée ; ils ne savaient pas encore distinguer clairement qui étaient leurs amis, qui étaient leurs ennemis ; ils n’étaient pas assez unis et organisés. Toutefois, la cause principale de ces échecs réside dans le fait que les travailleurs ont été trahis par les dirigeants des centrales syndicales. Les directions de ces centrales syndicales collaborent avec les capitalistes, les propriétaires fonciers et l’Etat capitaliste contre les travailleurs (…). Tirant les leçons de leurs expériences de lutte, les paysans pauvres ont été les premiers à rejeter la direction des organisations syndicales de collaboration de classe ; ils se sont unis, ont pris en main la direction et créé deux organisations syndicales de lutte de classe : UTA (Union des Travail-leurs Agricoles) et UPG (Union des Paysans Pauvres de la Guadeloupe). En trois ans ces deux organisations ont déclenché deux puissants mouvements de masse qui ont fait voir aux travailleurs de tous les secteurs le visage de traître des dirigeants de toutes les centrales syndicales.

Un grand nombre d’ouvriers, d’employés de tous les secteurs, des petits fonctionnaires ont approuvé l’orientation syndicale de l’UTA. Ils ont décidé de s’unir autour de celle-ci pour organiser une véritable centrale de lutte de classe. Au cours de multiples discussions avec des organisations syndicales de base et avec des travailleurs inorganisés, nous avons fait le bilan des luttes syndicales passées et nous avons défini notre ligne syndicale. Camarades ! Aujourd’hui nous tenons le congrès constitutif de l’UGTG (…).
Unité de lutte

L’unité du LKP, Lyannaj kont pwofitasyon (une cinquantaine de syndicats, organisations et associations), s’est faite clairement autour de l’UGTG, c’est-à-dire de la classe ouvrière. Et surtout, l’UGTG a des origines maoïstes (5), le secrétaire de la CGT est membre de Combat Ouvrier (proche de LO), la CTU est proche du NPA. Voilà une preuve de plus : ceux qui, au départ, semblent créer la division, puisqu’ils s’opposent à une ligne dominante de collaboration de classe, sont ceux qui, finalement, créent une solide unité. Tandis que les réformistes et leur ligne modérée ne font qu’entretenir les divisions et le découragement.
Ceux qui jouent les institutions de la « République » et les changements patients et démocratiques sont alors complètement dépassés. Le « discrédit de la classe politique locale » ne peut plus être passé sous silence. « Victorin Lurel (PS) et Jacques Gillot (divers gauche) ont lancé un appel à un assouplissement de la grève. Domota tourne leurs propos en dérision : « Nos élus nous demandent de rouvrir les écoles et de reprendre le travail », provoquant un immense éclat de rire de la foule » (6).
Il y a pourtant, dans le LKP, des organisations politiques en tant que telles. L’UPLG, union populaire pour la libération de la Guadeloupe, Combat ouvrier, le PC guadeloupéen, la Convention pour une Guadeloupe nouvelle… La gauche de la gauche, en quelque sorte. Qui a précisément pour mot-d’ordre central, le plus souvent, l’unité des luttes, un grand mouvement d’ensemble, la grève générale.
Les jeunes

Beaucoup de jeunes dans le mouvement, bien sûr. Une formidable expérience pour l’avenir… Même les « débordements » sont à noter, pour la manière dont ils ont été compris, interprétés. Jeunes en « désespérance », a dit Elie Domota. Victimes, d’abord (8). Notables aussi, ces « débordements », pour leurs cibles, à comparer avec celles de nos jeunes en France en novembre 2005. Un magasin est-il dévalisé, ou incendié ? Mais il appartient à la famille Hayot, une « grande famille » !
Rien n’est réglé

Rien n’est réglé, à terme, avec l’accord Jacques Bino. On pourrait rappeler l’expérience de mai-juin 1968. Que restait-il, quelques années après, des 33% d’augmentation du SMIC ? Rien n’est réglé mais les moyens de régler les problèmes ont fait un sacré pas en avant.
« La Guadeloupe, c’est à nous, la Guadeloupe, c’est pas à eux », dit l’hymne de la grève.
Et pour une fois, laissons le dernier mot à un patron, le président des professionnels de l’hôtellerie et du tourisme : « Domota et ses amis ont un objectif caché : mettre les Blancs dehors et prendre le pouvoir. C’est un mouvement insurrectionnel qui ne dit pas son nom »(7). Le pouvoir ouvrier et l’expropriation de la bourgeoisie coloniale : voilà le vrai danger !

Marc Crespin

La création de l’UGTG

Organisons une centrale syndicale de lutte de classe ! Tout au long de ces dernières années, les ouvriers, les paysans, les employés de différents secteurs, les petits fonctionnaires ont déclenché des actions de masse (grèves, manifestations, etc.) contre le renforcement de l’exploitation de la classe des capitalistes, la classe des propriétaires fonciers et de l’Etat qui est à leur service. La classe des capitalistes et la classe des propriétaires fonciers ont toujours utilisé une double tactique (d’une part les mensonges, les manœuvres de division et de corruption, d’autre part la répression armée) pour briser la juste lutte des travailleurs. Les travailleurs ont certes remporté quelques succés dans leur lutte, mais ils ont essuyé aussi beaucoup d’échecs.

Pourquoi ?

Les ouvriers, les paysans et les autres travailleurs n’avaient pas une conscience de classe assez élevée ; ils ne savaient pas encore distinguer clairement qui étaient leurs amis, qui étaient leurs ennemis ; ils n’étaient pas assez unis et organisés. Toutefois, la cause principale de ces échecs réside dans le fait que les travailleurs ont été trahis par les dirigeants des centrales syndicales. Les directions de ces centrales syndicales collaborent avec les capitalistes, les propriétaires fonciers et l’Etat capitaliste contre les travailleurs (�). Tirant les leçons de leurs expériences de lutte, les paysans pauvres ont été les premiers à rejeter la direction des organisations syndicales de collaboration de classe ; ils se sont unis, ont pris en main la direction et créé deux organisations syndicales de lutte de classe : UTA (Union des Travail-leurs Agricoles) et UPG (Union des Paysans Pauvres de la Guadeloupe). En trois ans ces deux organisations ont déclenché deux puissants mouvements de masse qui ont fait voir aux travailleurs de tous les secteurs le visage de traître des dirigeants de toutes les centrales syndicales. Un grand nombre d’ouvriers, d’employés de tous les secteurs, des petits fonctionnaires ont approuvé l’orientation syndicale de l’UTA. Ils ont décidé de s’unir autour de celle-ci pour organiser une véritable centrale de lutte de classe. Au cours de multiples discussions avec des organisations syndicales de base et avec des travailleurs inorganisés, nous avons fait le bilan des luttes syndicales passées et nous avons défini notre ligne syndicale. Camarades ! Aujourd’hui nous tenons le congrès constitutif de l’UGTG (�). Déployons tous nos efforts pour faire de l’UGTG une puissance organisation syndicale de classe et de masse, dirigée par la classe ouvrière ! Texte intégral sur : www.ugtg.org

(1) Le Monde, 10 février.
(2) Politis, 26 février.
(3) Politis, 19 février.
(4) Le Monde, 15-16 février.
(5) voir ci-contre.
(6) Le Parisien, 18 février.
(7) Le Parisien, 17 février.
(8) Voir le blog Ouvalacgt.

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