Approfondir > Il y a 90 ans, au congrès de Tours, le PC était fondé !

Il y a 90 ans, au congrès de Tours, le PC était fondé !

A propos de quelques commémorations

 

Alors que depuis des décennies, la classe ouvrière et tous les exploités font face à des attaques répétées qui se renforcent avec la crise, ils restent désorganisés. Le manque d’un parti de classe, porteur d’une alternative sociale et politique, organisant l’avant garde du prolétariat, se fait durement sentir. La reconstruction d’un nouveau parti communiste est donc la tâche que se fixe VP. Mais cela exige de faire le tri dans l’expérience communiste dont nous nous revendiquons. Le tri entre les acquis, les erreurs, mais aussi les trahisons d’un parti, le PCF, dont la ligne politique a évolué pour finir par sombrer dans le révisionnisme et la social-démocratie.
Ce 90e anniversaire est particulièrement salué. Il faut voir là une chose positive qui marque justement l’urgence de la reconstruction d’un parti communiste en France. Malheureusement, le contenu de ces commémorations est peu en rupture avec le révisionnisme du PCF. Deux appels à commémorer cet événement en témoignent.
Le premier émane du Cercle Henri Barbusse, il parle d’une phase ascendante

 

« pendant laquelle, le PCF comme force dirigeante des luttes ouvrières et populaires a permis les conquêtes sociales et démocratiques. Cette période est illustrée par ces dates : 1936 par le Front populaire antifasciste avec les 8 h et les congés payés, 1945 par le Conseil national de la Résistance avec la sécurité sociale et la retraite par répartition, […] et 1968 par un mouvement social et démocratique qui a procuré des hausses de salaire de 30%, des droits syndicaux renforcés. »

 

Pour ce cercle, l’opportunisme et le réformisme ne se manifestent que dans les années 1970, avec l’abandon de la Dictature du prolétariat, et le programme de gouvernement avec le PS.
Le deuxième appel est commun à l’URCF et au PRCF. Il y est écrit que :

 

« Pendant des décennies en effet, le PCF a tenu haut le drapeau de la lutte de classe, de la perspective révolutionnaire du socialisme, de la solidarité internationale, de l’indépendance nationale, du progrès social et des libertés.
Il l’a fait dans une union fraternelle avec le mouvement communiste international, avec les peuples qui construisaient la première expérience socialiste de l’histoire, en travaillant en lien étroit avec le mouvement syndical de classe […] en prenant la tête du Front populaire antifasciste, de la Résistance patriotique armée, en étant l’âme du CNR et des conquêtes sociales de la Libération ».

 

Il est un fait indéniable. Pendant des décennies le PCF a porté les aspirations d’une partie de la classe ouvrière. Aspirations dans la lutte pour de meilleures conditions d’existence, aspirations à une autre société. Beaucoup de ses militants de ce parti ont payé de leur vie leur engagement dans la résistance. Beaucoup plus d’autres ont donné leur temps sans compter pour défendre leurs camarades de travail et pour cela ont subit la répression patronale. Mais d’autres n’ont pas craint, par internationalisme, à suivre des voies contraires à celle voulue par la direction du Parti, comme par exemple en soutenant la lutte du FLN.
Ces engagements qui montrent la détermination d’ouvriers dans la lutte pour leur émancipation, ne doit pas occulter les erreurs, l’opportunisme, puis les trahisons de leur Parti. Tout au contraire, c’est rendre justice au dévouement de ces travailleurs à leur classe, à leurs engagements dans des combats difficiles, que de pointer ce qui, dans la politique de leur Parti, a conduit à des défaites, à nourri l’opportunisme, à débouché sur des trahisons, non seulement d’une orientation marxiste léninisme, mais aussi de leurs propres aspirations.
Pour prétendre reconstruire un parti nouveau, il faut faire le tri dans ce que l’ancien a porté de positif et ce qu’il faut en rejeter. Et cela les groupes politiques précités, ne semblent pas prêts à le faire.
Pour éclairer certains aspects de ce bilan, nous proposons un aperçu rapide de ce que le Parti crée en 1920, a représenté pour la classe ouvrière, au cours des moments décisifs de ses combats.

 

La portée du congrès de Tours, et la construction du PC (Section française de l’internationale communiste).

 

Le congrès de Tours est une date importante dans l’histoire du mouvement ouvrier français. Le PCF a été créé à ce congrès en décembre 1920, par décision de la majorité du Parti Socialiste SFIO (Section française de l’Internationale Ouvrière) d’adhérer à l’Internationale communiste (IC). Pourtant ce congrès, à l’image du Parti socialiste, n’est pas ouvrier. Seul 20 % des délégués le sont. La petite bourgeoisie traditionnelle (artisans, commerçants, professions libérales) représente 40 % des congressistes, le reste étant des employés et des fonctionnaires (surtout enseignants). La majorité du PS accepte pourtant les 21 conditions mises par l’Internationale communiste à l’adhésion à celle-ci. Le parti regroupe, après le départ de ceux qui maintiennent la SFIO, 100.000 adhérents. Ils ne seront plus que 25.000 dix ans plus tard.
En l’Allemagne, le PC se crée dans un contexte d’insurrections ouvrières, en Italie alors que le pays connaît une vague d’occupations d’usines. Rien de tel pour la France. Le nouveau PCF et ses adhérents n’ont pas été confrontés aux exigences de la lutte révolutionnaire. Avant guerre, ils ont été, au contraire, formés et éduqués au parlementarisme qui a éloigné du PS les ouvriers combatifs de la CGT dominée alors par l’anarcho-syndicalisme et le syndicalisme révolutionnaire. Le mouvement pour l’adhésion à l’IC repose donc sur trois impulsions : le rejet de la guerre que les ouvriers et les paysans ont durement payé ; l’impact de la révolution d’octobre dont le prestige est immense ; et de façon moindre les grandes grèves des années 1919 et 1920 en France.
Le parti qui naît en décembre 1920 n’a alors de communiste que le nom, même si l’adhésion au communisme de ses membres et dirigeants est sincère. Il doit sa création au ralliement du centre du PS aux thèses de l’Internationale. La figure de proue de ce courant est Marcel Cachin que Lénine a convaincu de soutenir l’adhésion. Pendant la guerre impérialiste de 14/18, ce centre avait appuyé la politique d’union nationale avec la bourgeoisie. Dans ses structures et ses activités, le parti conserve des pratiques social-démocrates. Il est organisé en vue des élections non pour la conquête du prolétariat. De plus contrairement aux PC allemand et italien, dont les dirigeants sont des combattants et des théoriciens, le PC français, n’a à sa tête que des dirigeants petits-bourgeois sans envergure politique et sans formation théorique marxiste. De plus l’adhésion de beaucoup d’entre eux aux thèses de l’IC reste assez superficielle, et ils ne tarderont pas à retourner au PS (SFIO). La thèse 8, concernant le soutien à la lutte d’indépendance des peuples coloniaux, est contestée par les sections algériennes sans que la direction du Parti ne s’en émeuve.

 

 

Le congrès de Tours ne marque donc pas la création d’un Parti communiste digne de ce nom, mais le début du processus de sa construction. En 1922, Lénine constate que la transformation d’un « parti européen parlementaire, réformiste en fait et seulement teint d’une légère couleur révolutionnaire, en parti de type nouveau, en parti réellement révolutionnaire, réellement communiste, est quelques chose d’extrêmement difficile. L’exemple de la France montre cette difficulté peut être de la façon la plus évidente ».
Ce processus prend dix ans. L’IC y joue un rôle de premier plan. Il se traduit par un affaiblissement numérique, beaucoup de membres fondateurs l’abandonnant pour retourner à la SFIO, mais aussi par un renforcement de son recrutement prolétarien. De jeunes ouvriers, souvent issus des courants anarcho-syndicalistes et syndicalistes révolutionnaires de la CGT adhèrent au parti. Celui-ci leur paraît pouvoir rompre avec le carriérisme politique du PS. C’est à partir d’eux que se bâtit au début des années 1930, la direction qui restera à la tête du parti pendant 30 ans.
En 1924, sous la pression de l’IC, est engagé le processus de bolchevisation du Parti. Celui-ci consiste à abandonner la structuration en sections calquées sur les découpages électoraux pour organiser le parti en cellules dans le prolétariat, principalement industriel. Tous les membres (sauf les paysans) sont affectés à des cellules d’entreprise.
En 1928, le PC (dans le cadre des orientations de l’IC) s’engage dans une politique dite « Classe contre classe ». Cette orientation est sous-tendue par la conviction de l’imminence d’une crise révolutionnaire, qui s’avérera vite fausse. Elle contribue à l’activisme militant et au rejet de toute réflexion théorique au prétexte que cette imminence rend les « spéculations intellectuelles » inutiles, aggravant les carences théorique et politique du Parti.
La politique « classe contre classe » a deux volets. Un externe qui est la rupture (l’affrontement) avec la social-démocratie qui devient un ennemi essentiel. Un interne qui se traduit par un ouvriérisme intransigeant qui rejette tous les cadres ou membres intellectuels du parti (beaucoup ne sont qu’instituteurs). Aggravée par la direction sectaire du Parti, cette politique conduit à un nouvel affaiblissement, y compris dans le prolétariat où disparaissent en 3 ans près des deux tiers des 900 cellules d’entreprises existant en 1927. Par ailleurs cette politique sous estime l’importance du travail syndical. Les grèves n’ont d’intérêt que si elles sont politiques.
Mais cette politique, dans un contexte de reflux du mouvement gréviste et des adhésions au PC, a pour contre partie l’influence grandissante des militants et des cadres issus des jeunesses communistes qui n’ont pas connu la SFIO. Malgré les errements qui témoignent de la faiblesse de ses assises idéologique et politique, comme par exemple en 1927 le mot d’ordre de fermeture des frontières à l’immigration, le Parti adopte et conserve des positions de classe anti-impérialistes et internationalistes. En 1925, il soutient la lutte des nationalistes marocains, comme le droit à l’indépendance des peuples colonisés.

 

1930 – 1937 : La stabilisation du Parti, la conquête des masses et l’opportunisme

 

En 1930, le Parti commence à avoir les caractères d’un parti communiste prolétarien. Il lui manque toute fois une ligne politique stable appuyée sur une théorie révolutionnaire répondant aux exigences de la lutte des classes en France. 1930 constitue aussi le début de la stabilisation de la direction du PCF (Thorez devient secrétaire général), par la mise en place d’une promotion de cadres ouvriers aux postes de directions. Ces cadres deviennent les « intellectuels organiques » du parti au sens de Gramsci. 1930 amorce, sinon l’abandon progressif de la ligne « classe contre classe », du moins son inflexion dans un sens moins sectaire. Cela se fait par l’intervention de la direction de l’IC. Cette dernière est consciente des lacunes politiques et théoriques du PC. Elle nomme donc un délégué permanent auprès du PC (Evgen Fried) et d’autres auprès des organisations contrôlées par le parti (CGTU entre autre), pour doter le Parti d’une véritable capacité de direction politique. Le PC est invité par elle à renouer avec une activité syndicale fondée sur les revendications quotidiennes pour le sortir de son isolement sectaire.
Cette réorientation se fait à l’occasion de la destitution de deux dirigeants, Barbé et Célor, accusés de fractionnisme. Si fraction il y a, c’est avec l’appui de l’IC qui réunit alors, à part, les jeunes cadres issus des JC pour préparer la relève. Les autres membres de cette « fraction », Billoux, Thorez et d’autres, ne furent nullement inquiétés. Ils deviennent au contraire la nouvelle direction. L’affaire Barbé Célor inaugure une pratique du PC consistant à traiter des problèmes politiques (là un changement d’orientation) par des moyens non politiques (l’accusation fausse de fraction dans ce cas, plus tard celle de collusion avec la police pour exclure André Marty en 1953).

 

 

La ligne « classe contre classe » qui fait du PS (SFIO) l’ennemi principal en tant que parti « social fasciste » est abandonnée progressivement entre 1934 et 1935. En 1935, cet abandon débouche sur la signature d’un programme de Rassemblement populaire avec le PS (en mai 35), qui assurera la victoire électorale qui débouche sur la formation d’un gouvernement de Front populaire en juin 1936. Cette réorientation est la conséquence de deux facteurs. Le premier est la pression ouvrière à la base vers l’unité, le seconde, un peu plus tardive est la réorientation de la politique de l’IC, qui faisant le bilan des graves échecs subits en Allemagne, propose une tactique de Front unique anti-fasciste avec les socialistes.
A Paris, le 6 février 1934, les ligues d’extrême droite cherchent à attaquer le parlement, dans un contexte de scandale financier. L’émeute fait plusieurs morts. Le PCF refuse alors de choisir entre « la peste et le choléra », entre le fascisme et la démocratie bourgeoise. Mais le 12 février, deux manifestations appelées séparément par la CGT / SFIO et la CGTU/ PCFse rejoignent à la Nation aux cris de « Unité Unité ». Il y a débat dans le parti entre Doriot [1] qui souhaite l’unité avec les socialistes et Thorez qui affirme encore le 19 avril 1934 qu’il faut faire « bloc contre le social fascisme ».
En mai 1934, Thorez et Doriot sont convoqués à Moscou. Seul Thorez s’y rend. Il est reçu par Dimitrov (secrétaire de l’IC) qui l’informe du changement d’orientation de la politique de l’IC dans un sens plus unitaire et anti-fasciste qui est officialisé au VII congrès de l’IC en 1935. Revenu, en France Thorez persiste encore dans une attitude de dénonciation du PS. Plusieurs télégrammes de l’IC l’incitent à infléchir la ligne dans un sens unitaire. Le 9 octobre, le PCF propose donc un large Front Populaire anti-fasciste élargi au Parti Radical. Début 1935, l’IC conseille au PCF de ne plus condamner la Marseillaise et le Drapeau Tricolore. Le PC se fait dès lors l’ardent défenseur de la nation et de la démocratie bourgeoise.
Aux élections municipales de 1935, le PCF fait un accord électoral avec la SFIO. Le PCF double le nombre de municipalités qu’il dirige par rapport à 1929. Mais c’est dans la Région parisienne que le succès est spectaculaire (multiplication par 3). Les élections législatives d’avril / mai 1936 sont un nouveau succès pour lui. Il double le nombre de voix recueillies, et passe de 10 députés à 70. Il ne participe pas au gouvernement de Front Populaire (formé par des socialistes et des radicaux) ; mais le soutient.
Ses effectifs qui étaient de 70.000 en 1935 atteignent 328.000 en fin 1937. S’ils n’en sont pas les initiateurs, les cadres et militants du PC sont les organisateurs des grèves avec occupation. Elles démarrent à partir du 1er mai, mais ne se généralisent qu’à la fin du mois. Il capitalise en adhérents l’aspiration ouvrière à l’unité. Les militants formés dans la période de « classe contre classe » et dans la CGTU [2], permettent au PC de s’ancrer dans la classe ouvrière, et surtout dans la métallurgie. Au sein de celle-ci, ce sont les ouvriers professionnels qu’il gagne (le parti aura toujours du mal à s’implanter solidement parmi les OS). La région parisienne concentre les nouvelles activités métallurgiques en fort développement (Automobile, aviation). La métallurgie est la grande industrie de la région, près de 400.000 ouvriers y sont employés. Le PCF y a 1/3 de ses adhérents.
Le moment où le PCF devient « le parti de la classe » est aussi celui où il abandonne dans les faits une politique d’indépendance de classe. Les deux constats ne sont pas contradictoires. Le PC et ses militants sont les défenseurs des intérêts économiques des travailleurs. Cela est incontestable. Mais en même temps, le PC, pour devenir un parti de masse, abandonne les positions idéologique et politique qui vont à contre courant de l’idéologie républicaine et patriotique dominante dans la masse des travailleurs. Rester un parti de masse signifie pour le parti élargir une influence électorale qui assure à ses dirigeants des positions dans l’appareil politique bourgeois. L’abandon des positions communistes et internationalistes se manifeste sur plusieurs questions essentielles.
En fusionnant le Drapeau rouge et le drapeau tricolore, il capte l’influence que les sociaux démocrates conservaient dans la classe ouvrière. Il cesse aussi d’être à contre courant du démocratisme bourgeois dominant parmi les ouvriers et que renforce la menace fasciste. Pour gagner la petite bourgeoise, il s’affirme un parti de l’ordre et de la nation. En 1936, Thorez vante ainsi les qualités du PCF : « notre discipline et notre amour de l’ordre [qui] répondent dans ce pays si facilement et parfois si dangereusement individualiste à ce dont il a le plus besoin pour trouver son équilibre : la mesure ». Le PCF est « solidement enraciné à la terre de France ». « Tout commande aux ouvriers de notre pays, si fiers de leur métier et si magnifiques de conscience professionnelle, de s’unir aux paysans dont le rude labeur a tant contribué à faire la grandeur de la France et avec l’ensemble des classes moyennes en qui vivent de si précieuses qualités de labeur et d’épargne ». Ce sont là des qualités bien petites bourgeoises et chauvines.
Le PCF renonce à l’antimilitarisme révolutionnaire pour voter les crédits militaires. Le 2 mai 1935, Staline a signé avec Laval, chef du gouvernement français, un pacte d’assistance militaire entre la France et l’URSS. Le PC approuve dès lors la politique de défense nationale de la France impérialiste. Le PCF, qui en juin 1934, affirmait encore que « nous ne voulons pas croire un instant à la défense nationale. Nous sommes restés, nous, à cette phrase de Marx : ‘les prolétaires n’ont pas de patrie ‘ », fait alors campagne sur « Staline a raison », et vote les crédits de la défense nationale.
La volonté de ne pas choquer le chauvinisme national et l’idéologie colonialiste, qui restent encore forts parmi les travailleurs, mais aussi celle de faire alliance avec le PS et les radicaux-socialistes [3], conduisent le PCF à abandonner la défense du droit des peuples des colonies à l’indépendance. Quand en 1937, le gouvernement de Front populaire interdit l’Etoile nord africaine, l’organisation nationaliste et indépendantiste Algérienne, le PCF ne soulève aucune protestation. Bien plus en 1939, Thorez affirme que l’Algérie n’est qu’une nation en formation et n’est pas mure pour l’indépendance. Le PCF cesse d’être le parti de la classe ouvrière de France, pour devenir, quelles que soient ses déclarations internationalistes, le parti de la classe ouvrière française.
A partir de 1936, le PC modifie progressivement son attitude par rapport à l’Etat bourgeois. Jusqu’aux années du Front populaire, le PCF est hostile à tout renforcement du pouvoir économique de l’Etat. Il s’oppose aux nationalisations qu’il refuse de voir inscrites au programme commun de Front Populaire. Pour lui, pour nationaliser, « il faut le pouvoir ; et prendre le pouvoir, pour nous, cela ne se fait que d’une seule façon : par la dictature du prolétariat, par le pouvoir des soviets » [4]. Le PCF affirme que « les nationalisations dans un cadre capitaliste ne pourraient conduire qu’au renforcement de l’Etat bourgeois, à une plus grande concentration des moyens de domination et d’oppression entre les mains de l’oligarchie financière. Ce serait simplement accélérer le procès de fascisation de l’Etat ». [5] Les nationalisations sont alors défendues par la SFIO, et par la CGT réformiste, comme préparant la transition vers une société socialiste. Vers la fin des années 30, le PCF commence à en accepter le principe dans un certain nombre de cas. Il abandonne peu à peu la critique intransigeante de l’Etat bourgeois. En 1938, il inscrit dans son programme les nationalisations, et affirme que l’action de l’Etat peut être positive « dans la mesure où il est influencé par les masses populaires ». Les nationalisations doivent « donner à l’Etat le contrôle de la gestion des cartels, la fixation des prix et le droit de refuser une fusion » [6]. Ainsi, il fait sien, à peu de choses près, le programme de la SFIO.
En 1937, la ligne du PC est nettement opportuniste. Au sortir de la guerre, le Parti s’engagera dans la collaboration de classe. Il renoncera dans les faits à toute attitude réellement révolutionnaire. La référence socialisme ne sera plus que l’enrobage d’une politique bourgeoise.

 

La guerre, l’occupation, héroïsme militant et opportunisme politique

 

Le 23 août 1939, la signature du Pacte de non-agression [7] entre l’URSS et l’Allemagne Nazi déstabilise le parti et conduit à sa dissolution le 26 septembre. 34 députés communistes sont arrêtés, 25 quittent le parti. Le 10 avril 40, la peine de mort est établie contre les communistes, au titre de la trahison. Le PCF désorganisé par la répression et la mobilisation des hommes tombe à moins de 5000 militants. Dans l’ensemble la classe ouvrière semble lui rester fidèle.
Après la signature du Pacte la direction du PC navigue à vue. Début septembre, avant son interdiction, il vote les crédits militaires. Après la dénonciation par l’IC de la guerre en cours comme une guerre entre impérialistes, prudent, il ne mène pas une politique de défaitisme révolutionnaire ou de sabotage, contrairement à ce qui lui sera reproché. Après la défaite française, en juin 40, le PC croit à une possibilité d’activité semi-légale. Il affirme à ses militants qu’une clause secrète du Pacte signé entre l’Allemagne et l’URSS garantit une activité communiste légale dans les pays occupés. Il se mobilise pour obtenir sa légalisation. Les Allemands avec qui sa direction a des contacts l’entretiennent dans cette illusion [8], qui sera un piège pour beaucoup de ses militants. Le PC voit dans la défaite de l’impérialisme français une victoire pour le prolétariat. Il entreprend de faire paraître légalement l’Humanité avec l’accord des forces d’occupation, légalisation qui est refusée. En juillet, ses militants reprennent une activité publique en zone occupée. Le parti dévoile ainsi beaucoup de ses militants restés libres. Dès juillet pourtant l’IC demande au PCF d’organiser la résistance passive, et le met en garde contre le danger de se compromettre avec l’occupant. Les contacts avec celui-ci sont explicitement condamnés par l’IC le 5 août.
Dès juillet 1940, les cadres du parti, tels que Frachon, Tillon, Havez, Guingouin, atterrés par la politique impulsée par Duclos, commencent à organiser la résistance contre les forces d’occupation. A l’automne 1940, la répression allemande s’abat sur le Parti. Mais pendant les mois qui suivent les ambiguïtés de sa politique — dénonciation de Vichy et ménagement des Allemands — désorientent ses militants qui ne comprennent guère la politique de la direction. Le 1er mai 1941, l’appel de l’IC demande aux communistes de lutter non seulement pour leurs intérêts de classe ; mais aussi pour leurs revendications nationales. Fin mai début juin 1941, 100.000 mineurs du nord font grève sur leurs revendications économiques et patriotiques. En juin 41, l’attaque de l’URSS par l’Allemagne finit de faire basculer les communistes dans la résistance. La politique du Parti redevient cohérente. Elle articule la défense des intérêts ouvriers, celles de la nation et de l’URSS.

 

La création du Front National en juin 41 et puis celle des FTP (Francs tireurs et partisan) manifestent la volonté du PCF d’être la force dirigeante de la résistance nationale. Ce que De Gaulle refuse et combat. Après la création du CNR (Conseil National de la Résistance) par l’envoyé de De Gaulle, Jean Moulin, le PCF et le CNR s’opposent sur le rôle de la lutte armée. En décembre 1943, le PCF accepte d’intégrer les FTP dans les FFI (Forces françaises de l’Intérieur) gaullistes, mais leur direction opérationnelle reste en fait indépendante. Après le débarquement en 1944, les FTP déclencheront des insurrections (en particulier dans le sud-ouest) en contradiction avec les directives gaullistes. Toutefois, les ouvriers encore employés dans les usines sont trop affaiblis pour pouvoir jouer un rôle décisif dans cette insurrection, comme le voulait le PCF en début 1944.
La lutte armée coûte au Parti de nombreux cadres et militants de valeur. Mais il a acquit un immense prestige dans la lutte nationale qui fait de lui à la Libération le premier parti de France. Mais c’est un nouveau parti. Beaucoup de ses cadres ont été tués et il en manque pour encadrer les milliers de nouveaux adhérents. De plus en gagnant dans toutes les classes des milliers de nouveaux électeurs (en 1947, il en a 700.000), il cesse d’être un parti majoritairement ouvrier. Dans ses bastions industriels de la région parisienne, il ne retrouve pas la force acquise en 1936. Sa déprolétarisation sociale relative encourage sa déprolétarisation politique. Il lui faut conserver l’influence gagnée auprès des paysans, des commerçants et des intellectuels.

 

Le PCF abandonne le combat de classe et pour celui de la restauration de la France.

 

Le programme du CNR, auquel le Parti a donné son accord, sans avoir été, contrairement aux affirmation des organisations citées au début de ce texte, le principal acteur de son élaboration [9], est un programme de restauration de l’impérialisme français. Conscients non seulement du rôle joué par la classe ouvrière dans la lutte nationale, et de la nécessité de la faire adhérer au programme de redressement national, la bourgeoisie et de Gaulle proposent des reformes sociales sans lesquelles l’appui des ouvriers ne pourrait être acquis.
A Alger, le 17 août 1944, André Marty pense que « la coexistence pacifique des forces populaires et des forces réactionnaires de l’oligarchie financière touche à sa fin ». Mais, rien ne se passe comme l’affirme Marty. La libération du pays conduit à une situation, non pas de double pouvoir, mais de double légitimité : celle de De Gaulle et de la résistance extérieure appuyer sur une armée nationale reconstituée et sur celle des alliés ; et celle de la résistance intérieure qui puise sa force dans la classe ouvrière et paysannerie.
De Gaulle s’emploie à restaurer l’Etat bourgeois, comme « représentant de l’intérêt de toute la nation » avec d’autant plus d’énergie que la bourgeoisie s’est largement discréditée dans la collaboration. Il va faire en sorte que la légitimité passe rapidement des organismes mis en place par la résistance intérieure à des instances démocratiques élues. Il s’emploie à faire désarmer les milices. Le PCF accepte de sacrifier les comités de Libération et les milices patriotiques ainsi que les positions qu’il avait acquises du fait de son rôle dans la résistance. De Gaulle dira de Thorez dans ses mémoires « Le retour de Maurice Thorez à la tête du Parti Communiste peut comporter actuellement plus d’avantage que d’inconvénients… Il va rendre en plusieurs occasions service à l’intérêt public. Dès le lendemain de son retour en France, il aide à mettre fin aux dernières séquelles des « milices patriotiques » que certains parmi les siens s’obstinent à maintenir dans une nouvelle clandestinité ». On ne peut être plus clair.

 

Le PCF a sacrifié les aspirations ouvrières à de profonds changements politiques et sociaux à la restauration de l’impérialisme français. Dès lors le PCF demande de produire d’abord pour vaincre l’Allemagne, puis par la bouche de Thorez à « produire, et encore produire pour le salut de la France et de la république ». Pour le PCF « Produire, et encore produire, faire du charbon, c’est la forme la plus élevée de la conscience de classe, de notre devoir de Français ». Cette politique la classe ouvrière va la payer durement : pouvoir d’achat en baisse, conditions de travail épouvantables, pour le seul bénéfice des entreprises et de la petite bourgeoisie traditionnelle (paysans, commerçants) qui s’enrichit grâce au marché noir. Le PCF, dont des dirigeants participent au gouvernement, gagne des positions dans l’appareil d’Etat, dans les organismes de gestion des retraites, de la Sécurité sociale, ainsi que dans les entreprises nationalisées (EDF, Aéronautique). Dans les usines, les ouvriers les plus qualifiés tirent avantage des primes qui récompensent leur investissement dans la bataille de la production. Ce que les OS ne sont pas en condition de faire. Ces ouvriers qualifiés s’investissent dans les CE et les comités mixtes à la production. Une partie d’entre eux se constitue en aristocratie ouvrière.
C’est pour cela que l’aristocratie ouvrière et la petite bourgeoisie cultiveront le mythe du programme du CNR (qui a permis de consolider leurs positions), en dépit du fait que la restauration de l’impérialisme français a été payée durement par la masse des ouvriers. Et par elle seule.
En 1945, le PCF est pour des nationalisations. Mais en 1944, il s’oppose encore au PS-SFIO qui voulait les généraliser. Il dénonce une politique faite « de morceaux de socialisme ». M. Thorez dit « nous sommes pour la révolution demain. En attendant, nous voulons que le régime capitaliste fonctionne selon ses propres lois […]. Nous n’avons pas à aider le capitalisme à s’amender ». Mais, il s’y oppose surtout à l’extension des nationalisations qui pourraient effrayer les petits propriétaires, les paysans, les artisans attachés à la propriété privée. En 1945, après avoir exigé des nationalisations comme sanction des traîtres (Renault, Gnome et Rhône), le PCF en réclame pour permettre l’effort de redressement national. Il le fait avec les mêmes arguments que les secteurs modernistes de la bourgeoisie. Il ne s’agit pas pour lui de faire avec celles-ci des innovations « socialistes ». « Nous envisageons les nationalisations en fonction des nécessités de la reconstruction économique, de l’indépendance nationale, et du renouvellement de notre démocratie hors de l’influence des trusts internationaux. Par rapport à quelques démagogues, nous pouvons paraître modérés. Par rapport aux volontés des coalitions bancaires et industrielles, nous sommes plus sérieux ». [10]

 

La bataille pour la production n’a pas été immédiatement impopulaire. Les ouvriers y participent activement avec l’ambition de voir leur situation matérielle s’améliorer et les pénuries disparaître. Néanmoins, cette participation a des limites. Quand pour le premier mai 1945, la direction de la CGT propose que ce jour soit chômé mais récupéré par les ouvriers avec reports des heures perdues sur les semaines suivantes, cela ne passe pas. Fin 1946 et début 1947, des grèves commencent à être déclenchées malgré l’opposition du Parti, pour qui les « grèves sont l’arme des trusts ». Les militants communistes de base participent souvent à celles-ci malgré les rappels à l’ordre des directions.
La subordination du PCF à la défense des intérêts de l’impérialisme français est encore plus nette en ce qui concerne les colonies. Entre 1940 et 1941, il a défendu l’indépendance pour les colonies dans le contexte d’une guerre dite impérialiste. Dès 1942, l’union nationale redevient principale, alors le droit à l’indépendance est « oublié ». En 1944, le PCF s’oppose à une initiative américaine d’internationalisation des colonies. Il affirme que son but « est clair, unité et intégrité de la plus grande France, des Antilles à Madagascar, de Dakar à Casablanca, de l’Indochine et à l’Océanie. Notre pays est une puissance des cinq parties du Monde, et ne se découvre pas de raison pour laquelle il devrait cesser de l’être au profit des grands Etats, en abdiquant en leur faveur sa souveraineté sur les territoires ou sur les richesses ». En conséquence de quoi le PCF soutient la répression des manifestations nationalistes du 8 mai 1945, en affirmant qu’il fallait « châtier rapidement et impitoyablement… les instigateurs de la révolte et les hommes de main qui ont dirigé l’émeute ».
A la Libération, le PCF approfondit sa rupture avec les positions communistes sur la question de l’Etat. Il n’est plus question d’instaurer un Etat de type nouveau fondé sur les soviets ouvriers. Pour le PCF dès lors, le passage au socialisme n’implique plus la destruction de l’Etat bourgeois, car

« L’avantage de la démocratie populaire […], c’est qu’elle rend possible le passage au socialisme sans dictature du prolétariat ». Ou encore «  Quand le camarade Dimitrov est chef du gouvernement, quand le ministre de la guerre est communiste, quand le ministre de l’intérieur et le chef de la police de Sofia sont communistes, etc, vous savez cela peut s’appeler la dictature d du prolétariat. En fait le pouvoir est entre les mains de la classe ouvrière »

 [11].

 

Il suffit donc de prendre le pouvoir bourgeois, pour instaurer pacifiquement, une forme de « dictature du prolétariat » qui ne doit rien au prolétariat (le PCF ne parle plus des soviets comme dans la première moitié des années 30), mais permet aux couches dirigeantes du parti de s’intégrer à la direction bourgeoise de la société. Les nationalisations sont maintenant envisagées comme des mesures démocratiques limitant le pouvoir des féodalités économiques qui menacent les institutions de la république. Elles seraient maintenant une préparation possible du socialisme. Comme le dit Thorez interviewé par le journal anglais Times, la tâche de la classe ouvrière est de « développer la démocratie jusqu’au bout et de rechercher les formes de ce développement,[et de] les mettre à l’épreuve dans la pratique », dans la perspective d’une « démocratie débarrassée des trusts ».
L’abandon politique de la dictature du prolétariat date de cette époque. Si en 1977, le PCF supprime celle-ci de son programme, sans faire de vagues, c’est que cette perspective n’oriente plus son activité depuis longtemps [12]. Le thème de l’antifascisme devient (et ce sera le cas jusqu’aux années 60), un levier de mobilisation populaire, qui induit inévitablement une défense des institutions républicaines.

 

La révolution en principe pour demain … l’opportunisme au quotidien

 

En mars 1947, lors du vote des crédits militaires demandés pour mener la guerre au Vietnam contre les combattants de Ho Chi Minh, les députés du PCF s’abstiennent. Mais les ministres communistes votent les crédits, par solidarité gouvernementale. En fin avril, début mai, une grève à Renault, d’abord condamnée par le PCF et la CGT, puis reprise en main par eux, est le prétexte de l’exclusion des ministres communistes du gouvernement, qui se sont désolidarisés de sa politique économique. Le PCF pense alors pourvoir y revenir grâce à la pression des masses. Hors du gouvernement, il ne cesse pas pour autant de défendre la bataille de la production et l’intérêt national.
La sortie du gouvernement, comme la rupture avec la SFIO, sont un « ouf salutaire » pour la base du parti qui ne comprenait pas une politique qu’elle appliquait néanmoins. Le printemps et l’automne 1947 sont marqués par une radicalisation de l’activité des militants du PCF qui trouve un écho parmi les travailleurs dont le pouvoir d’achat et les conditions de vie se sont dégradées depuis la Libération.
Au printemps 1947, les ouvriers engagent des grèves que le PCF appuie sans jamais leur donner une forme d’organisation coordonnée. S’il n’entend plus s’opposer frontalement à la manifestation des aspirations ouvrières, il a le souci d’en modérer l’expression. Il tient à éviter qu’elles soient perçues comme contrariant l’effort de production afin de ne pas éloigner de lui des classes moyennes que les « grèves inquiètent » [13]. Il ne s’agit pas d’épargner le gouvernement, mais de ménager les classes moyennes et les petits propriétaires qui contribuent notablement à ses succès électoraux. Aussi, en juillet 1947, salue-t-il comme très positifs les contacts puis l’accord entre la CGT et le Patronat qui « peuvent permettre de faire cesser l’agitation sociale et de développer à nouveau la production et la productivité » [14].
En octobre 1947, en Pologne, lors de la création du bureau d’information des partis communistes européens (Kominform), le PCF est très violemment critiqué. Il l’est moins pour son abandon d’une position de classe, que pour son alliance avec la SFIO que l’URSS considère comme le principal agent de l’impérialisme américain. Il est aussi mis en cause par les Yougoslaves pour avoir été conciliateur avec De Gaulle pendant la résistance. L’autocritique du PCF conduit à une politique édulcorée de « Classe contre classe » dans lequel l’impérialisme américain et la SFIO deviennent les ennemis principaux dans la défense de l’indépendance nationale. En novembre 1947, le secrétariat du PCF invite à la mobilisation des masses « dans les Comités de défense de l’industrie et de la république, en tenant compte que dans les industries menacées, il faut faire passer en priorité la défense de la dite industrie ». A son retour d’URSS, lors du CC de décembre 1947, Thorez critique les cadres du Parti pour s’être laissés entraîner dans des grèves de novembre qui nuisaient à l’unité nationale contre l’impérialisme américain. Thorez dit alors qu’il « est possible dans notre lutte pour l’indépendance nationale de solidariser la classe ouvrière, non seulement des éléments des classes moyennes, non seulement des paysans, des petits commerçants, des techniciens, etc […], mais aussi des patrons ».

 

La tension entre l’URSS et les USA pousse le PCF à radicaliser ses actions dans la défense de la Paix (donc de l’URSS), dans la lutte anti-impérialiste (contre les USA). De 1947 à 1953, l’impérialisme français est ignoré par le PCF qui n’en fait pas son adversaire principal. Les trusts français sont combattus pour leur « cosmopolitisme » qui est « signe de faiblesse et de décomposition du capitalisme dans sa phase pourrissante ». Le refus de l’asservissement de la France devient un thème central de la propagande du PCF qui soutient la défense du territoire, de l’économie, et de la culture française. Le PCF se veut l’héritier de 1789, du rationalisme, de l’Encyclopédie. Il identifie la classe ouvrière à la nation. Pour le PCF, lui-même et la classe ouvrière sont les seuls véritables représentants et défenseurs des intérêts nationaux.
Toutefois, après 1947, dans les entreprises, le Parti abandonne la politique ouverte de collaboration de classe des années 44-46. Il gauchit son discours et met en avant la défense des droits nationaux des peuples colonisés, qu’il abandonnera lorsque le FLN déclenchera la guerre de Libération nationale. Il engage des grèves violentes : grève du 12 février 1952 commémorant la manifestation anti-fasciste du 12 février 1934, grève de contre la venue à Paris du général américain Ridgway [15] le 28 mai 1952, suivie d’une grève générale le 4 juin pour la libération de Jacques Duclos arrêté à la fin de la manifestation contre Ridgway. La répression contre le PCF est très forte. Certains de ses dirigeants sont arrêtés, l’Humanité est souvent interdite. A Renault la CGT et le PCF sont décapités avec le licenciement de 400 militants au premier semestre 1952. A l’occasion de ces grèves minoritaires, le PCF et la CGT se coupent de la masse des travailleurs. Seul le noyau militant du PCF se radicalise, exprimant des aspirations de classes fortes dans ces batailles, mais sous une orientation générale marquée par la défense de la nation, de l’antifascisme et sans véritable perspective politique. Après l’échec de ces mouvements, après la répression qui le frappe, avec le recul de son influence de masse, le PCF recherche une alliance avec le PS et à renouer avec les masses ouvrières par le travail syndical. Craignant maintenant la répression de l’Etat bourgeois, il s’applique à respecter à la légalité républicaine.
Le déclenchement de la lutte de libération nationale du peuple algérien se fait dans ce contexte. Il prend le PCF à contre-pied. Le parti condamne les attentats, comme contraire aux enseignements de Lénine pour qui, selon lui, seule action de masse serait juste. Mais il exige à la prise en compte les droits nationaux du peuple algérien dont il voit encore l’avenir dans le cadre d’une Union française. Droits nationaux ne signifient pas alors pour lui droit à l’indépendance.
Début 1956, les militants communistes s’opposent aux départs des conscrits pour l’Algérie, mais le soutien de leur parti au gouvernement du socialiste Guy Mollet [16], en qui il voyait un nouveau gouvernement de Front populaire, puis son vote des pouvoirs spéciaux à ce gouvernement, le discrédite auprès de la jeunesse et des ouvriers algériens. Pour justifier le soutien au PCF à ce gouvernement qui engage la guerre à outrance contre le peuple algérien, Thorez dit alors, qu’il ne fallait pas sacrifier le tout (l’alliance avec la PS) à la partie (le soutien anti-impérialiste à la lutte du peuple algérien).
Il ne mobilise que pour la paix en Algérie, au nom de l’intérêt que la France y aurait. En 1955, le Secrétariat du Parti demande aux militants d’« affirmer le caractère national de la politique du Parti » et montrer que la politique « ultra colonialiste » est « contraire à l’intérêt de la France et favorise l’intervention étrangère et plus particulièrement celle de l’impérialisme américain ». En 1956, dans l’opposition au rappel des soldats pour la guerre, il demande de faire « valoir en plus des raisons de solidarité active avec le peuple algérien, des raisons d’intérêt de la France » [17]. Dans l’Humanité dimanche du 16 juin 1957, Léon Feix s’efforce de répondre aux questions que « se posent de bonne foi de nombreux français ». Il affirme qu’une rupture définitive «  serait un coup dur pour notre pays ». Il en vient à écrire que « seule une politique faisant droit aux légitimes revendications nationales de la grande masse des Algériens peut éviter une rupture définitive : indépendance ne signifie pas nécessairement séparation ». Bref le PCF est pour la Paix en Algérie d’abord parce qu’elle répond aux intérêts de la France. Comme le sera De Gaulle au début des années 1960.
Le PCF, soucieux de légalisme et de ne pas être impliqué dans des actions de soutien au FLN, exclut les militants arrêtés pour leur soutien aux Algériens, au nom du fait que seule l’action de masse compte. En octobre 1958, le comité de section Renault demande aux militants de s’employer à « détruire la thèse de la collusion PC/FLN » et d’ « assurer l’opinion que les communistes n’approuvent pas l’action terroriste menée en métropole par les éléments du FLN ». Le Parti s’oppose à la désertion des soldats engagés en Algérie.
Malgré son absence de soutien à la lutte pour l’indépendance, les mobilisations pour la Paix en Algérie ne trouvent qu’un faible écho parmi les ouvriers. La journée d’action et de grève pour la Paix en Algérie, déclenchée le 17 octobre 1957, est un échec dans les grandes entreprises. C’est seulement dans les mobilisations contre l’OAS, contre le fascisme et pour la démocratie, qu’il réussit, en 1961 et 1962 à mobiliser des ouvriers. Ces derniers ne sont pas prêts à soutenir la lutte nationale de leurs « frères de classe algériens ». Plusieurs millions d’ouvriers débrayeront après la mort de 8 travailleurs dans une charge de police, lors d’une manifestation contre l’OAS, au métro Charonne en février 1961. Quelles centaines seulement l’avaient fait après le massacre de centaines d’ouvriers algériens par la même police en octobre 1961.
En 1956, les militants algériens du PCF quittent ce parti pour rejoindre le FLN en dénonçant l’abandon de toute attitude anti-impérialiste, son refus de soutien la guerre de libération nationale, ainsi que les préjugés racistes qui creusent un fossé entre les ouvriers. L’attitude du PCF face à cette guerre pèse encore dans la défiance que les prolétaires d’origine immigrée expriment encore à l’égard des militants français.

 

Le tournant des années 1960, Le gaullisme et le Capitalisme Monopoliste d’Etat (CME), l’union de la gauche

 

En 1958, le PCF voit d’abord dans le gaullisme une menace fasciste. Cela n’est pas sans fondement, car le Général arrive au gouvernement par un coup de force organisé par l’extrême droite. Mais ceux qui l’ont soutenu déchantent vite.
La proposition d’autodétermination pour le peuple algérien en 1959, puis l’affrontement entre De Gaulle et l’extrême droite colonialiste, comme son opposition aux USA (la France quitte le commandement unifié de l’OTAN), ne collent pas avec une caractérisation par le PCF des trusts comme essentiellement cosmopolites et anti-nationaux. L’attitude de De Gaulle qui défend les positions de l’impérialisme français ne vérifie pas cette analyse. Les théoriciens du PCF, regroupés autour de la revue Economie et Politique, formulent alors la théorie du CME pour rendre compte des particularités du gaullisme et de la réalité d’un impérialisme français en contradiction avec les USA. Ce CME est intégrée aux thèses du XVIIIe congrès de 1967 qui réaffirme avec insistance la voie pacifique de passage au socialisme. Le XVIIe congrès avait relancé la politique d’Union de la gauche et affirmé la nécessité d’un programme commun.

 

 

A la fin de la guerre d’Algérie, le PCF et la SFIO se rapprochent dans la lutte antifasciste. Dès lors le PCF concrétise peu à peu une politique d’alliance qu’il recherchait vainement depuis 1954. Le XVIe congrès du Parti de mai 1961, inscrit la perspective d’union des forces de gauche dans un large rassemblement social. Se fondant sur la nature du pouvoir gaulliste qui exprime « les vues et la politique du capital monopoliste » et qui donc « porte en lui, en permanence, la menace du fascisme » [18], le Parti affirme l’urgence de l’union des « couches les plus nombreuses de la population française : la classe ouvrière, la paysannerie laborieuse, les couches moyennes des villes, certaines fractions de la bourgeoisie » pour battre le « pouvoir personnel ». Il se donne donc pour tâche « de surmonter tous les obstacles à l’union ». La mobilisation des masses populaires ne peut plus se faire qu’en dégageant une « une perspective commune aux forces démocratiques » [19] sur la base d’un programme novateur qui, bien que n’entraînant pas « la suppression de l’exploitation de l’homme par l’homme [limiterait] la puissance des monopoles » [20].

 

Les socialistes restent encore réservés quant à une alliance sur un programme de gouvernement. En 1965, François Mitterrand présente sa candidature pour la première élection au suffrage direct du Président de la République. Le PCF lui apporte son soutien. Le 5 décembre, le candidat socialiste obtient 32 % des voix et met en ballottage le Général de Gaulle qui ne sera élu qu’au deuxième tour. La stratégie d’union s’en trouve confortée. Le 11 janvier 1966 la direction communiste propose à la gauche non communiste, regroupée dans la FGDS (Fédération de la gauche démocratique et sociale), un programme commun assorti d’un accord de désistement réciproque aux prochaines élections législatives qui est signé en décembre. Les élections législatives de mars 1967, en partie du fait des désistements, sont très favorables au PCF qui avec 22,5 % des suffrages exprimés, récupère la moitié des pertes relatives de 1958. L’union avec les socialistes est en Marche. Elle débouchera en 1972 sur la signature d’un programme commun de gouvernement.

 

La recherche d’un compromis avec le PS et certains secteurs de la bourgeoisie ne date donc pas des années 1970. Elle est bien plus ancienne. Elle a fait des dégâts en 1956. Depuis 1936, et sauf au début des années 1950, le PCF n’a hésité à sacrifier à l’union de la gauche les principes communistes dont il se réclame : l’internationalisme, l’anti-impérialisme, la défense des intérêts politiques de la classe ouvrière. Ce qui montre le peu de conviction qu’il mettait dans la défense de ces derniers.

 

Mai 1968, et les années 1970, le PCF contre les aspirations ouvrières

 

Au cours de la grève générale de mai juin 1968, il y a conflit entre les aspirations ouvrières à un changement et la politique du PCF et de la CGT. Ces organisations veulent cantonner le mouvement à des objectifs purement économiques. S’il n’y a pas eu de rupture de masse entre les ouvriers et le PCF, beaucoup d’ouvriers animés de sentiments de classe forts le quittent.
Le 27 mai, les grands centres industriels rejettent le compromis de Grenelle, au grand désarroi de Seguy dirigeant de la CGT. Renault, Peugeot Sochaux, Citroën. Le protocole de Grenelle est unanimement rejeté car présenté comme insuffisant. Deux semaines plus tard, à Sochaux, la grève se termine dans des conditions dramatiques. Un affrontement entre grévistes et forces de l’ordre coûte la vie à deux ouvriers, et fait rebondir une grève dont la reprise s’amorçait. L’émotion est grande à Sochaux, mais la mort de deux ouvriers ne fait pas l’objet d’une mobilisation nationale. Le PCF ne tient pas à mettre de l’huile sur le feu. En pleine campagne électorale, le PCF et la CGT ne veulent pas de la poursuite des occupations, ou de la relance du mouvement par une dénonciation de ces meurtres et encore moins d’affrontements. Comme le dira Henri Krasucki le 24 juin à Citroën, le lendemain du premier tour des élections législatives marqué par un progrès de la droite, « le pouvoir a tenté de présenter les grèves comme une entreprise de subversion pour effrayer une partie de la population. Il s’est servi, dans ce but, non seulement des violences qu’il a lui-même déchaînées, mais aussi de l’activité, des outrances et des violences de groupes d’aventuriers gauchistes et il y a réussi ». En mai, le PCF a bien joué sont rôle de parti responsable garant de l’ordre social, contre les débordements ouvriers, ou « gauchistes ».
Les années 1968, sont marquées par un renouveau de l’insubordination ouvrière (portée entre autre par les OS) et de la contestation révolutionnaire. Elles sont néanmoins des années de croissance de l’effectif du PCF dans la classe ouvrière, mais surtout dans le salariat non ouvrier. En 1967, le PCF compte 350.000 adhérents, en 1977, il en compte 530.000 (700.000 selon lui). Les employés et les ITC et les professions libérales ont remplacé les agriculteurs. Au Bureau politique les agrégés supplantent les instituteurs. Mais ses organes de direction restent à majorité ouvrière. Toutefois ces ouvriers contrairement à ceux des années 1930, ont accédé très vite au statut de fonctionnaires du Parti. Ce sont de vrais aristocrates ouvriers, dont l’expérience ouvrière est souvent fort brève.
Le Programme commun est le vecteur principal de la croissance numérique du Parti, car il donne une perspective politique (réformiste certes) à l’aspiration à l’unité et au changement de la masse des travailleurs. L’unité et le tous ensemble ont pour débouché l’union de la gauche, comme en 1936 et 1956. Le PCF vise alors le million d’adhérents. En 1979, deux tiers des membres ont adhéré après 1968. Mais ils ne sont pas à l’image de ceux qui avaient rejoint le parti dans les décennies précédentes. Leur engament militant reste faible, comme leur formation politique. Ils adhèrent sur les positions qui sont celles du parti depuis dix ans. Dès positions réformistes sans la moindre ambiguïté. Toutefois si le parti gagne en adhérents, il ne progresse pas en électeurs. Le Parti gagne des membres, mais la CGT en perd. Indice sans doute d’une part du changement dans le recrutement social du Parti, et d’autre part des attentes mises par les ouvriers dans le programme commun qui les détournent de l’action syndicale plus exigeante en terme d’engagement.

 

A la fin des années 70, après la reconstitution du PS, pour la première fois depuis 1936, les socialistes font des scores électoraux supérieurs au PCF. La dynamique unitaire du Programme commun ne profite pas dans les urnes au PCF. Ce dernier provoque donc la rupture du programme commun en 1977, à propos de la question des nationalisations. Elle est voulue par l’aristocratie ouvrière qui le dirige et qui croit pouvoir ainsi maintenir ses positions. Divisée la gauche perd les élections législatives de 1978. Cet échec amorce des crises et des contestations au sein du PCF venant de ceux qui impulsaient la ligne d’union de la gauche.

 

 

La crise touche d’abord les secteurs non ouvriers (la critique des intellectuels du parti se développe et les ruptures se succèdent). Pour la surmonter, la direction réactive les réflexes ouvriéristes les plus réactionnaires pour masquer sa responsabilité dans l’échec. La direction du PCF joue la carte du chauvinisme, non seulement à propos du « produisons français », mais aussi en lançant des campagnes contre les travailleurs immigrés. Le 24 décembre 1980, les militants du PCF bloquent un foyer de travailleurs africains à Vitry en utilisant un bulldozer. En février 1981 à Montigny-lès-Cormeilles le maire communiste dénonce une famille marocaine comme trafiquant de la drogue. Alors que le Bureau confédéral de la CGT a rédigé une déclaration condamnant l’action contre le foyer de Vitry, le PCF en bloque la diffusion. Le CC en critique le caractère opportuniste. Par ailleurs, le Parti refuse le droit de vote pour les immigrés, y compris au niveau local. La direction du PCF n’hésite pas à activer les positions réactionnaires que le mouvement de 1968 avait combattues. La campagne contre les immigrés s’accompagne de la part de Georges Marchais, son secrétaire général, d’une campagne contre les homosexuels. En 1982, le PCF dénonce la direction du journal Antoinette, journal de la CGT en direction des femmes, comme manipulée par les gauchistes, parce que trop féministe, et obtient le licenciement de ses journalistes.

 

 

Pour défendre ses positions, l’aristocratie ouvrière du PCF, encore contestée sur sa gauche par des courants révolutionnaires, est prête à toutes les bassesses politiques, pour gagner l’appui des travailleurs les plus rétrogrades. La dégénérescence de la direction du PCF n’est pas que politique, elle est idéologique. Elle s’oppose à tout ce que le mouvement de mai 1968 avait apporté de nouveau au mouvement ouvrier.

 

En conclusion

 

Tout le monde connaît la suite. Nous nous en tiendrons là. Nous avons voulu monter que le révisionnisme du PCF ne se réduit pas à sa participation au gouvernement de la gauche après 1981. Ses origines sont à rechercher bien plus loin dans son histoire. Si l’on veut reconstruire un parti communiste digne de ce nom, il faut débusquer l’origine du révisionnisme du PCF. Il faut examiner son histoire à partir des faits et de sa pratique, et non pas en construisant à propos de son passé, une histoire édifiante, mais fausse. Nous comprenons que, beaucoup de ceux qui sont restés au parti jusqu’au années 1990 aient quelques difficultés à contester une politique qu’ils ont défendue dans les années de la guerre d’Algérie, en 1968, et après. En s’opposant alors aux ouvriers révolutionnaires et aux marxistes-léninistes et maoïstes d’alors. Cela est humain. Mais nous pensons que justement c’est le moment de revenir sur ce passé et d’en tirer des enseignements. Nul ne peut se voir reprocher de s’être trompé. C’est de persévérer dans l’erreur qui est grave. A la lumière de l’expérience du PCF nous pouvons dégager quelques conclusions politiques.
- Le premier constat est que malgré son opportunisme et son abandon de la perspective révolutionnaire, le PCF est resté un parti majoritaire dans la classe ouvrière. Il le doit d’abord à l’implication de ses militants dans la défense, au quotidien, des intérêts économiques des ouvriers. De cela nous concluons trois choses. La première est que les communistes doivent évidemment s’impliquer dans cette défense, pour gagner la confiance des ouvriers. La deuxième est qu’ils ne le peuvent qu’en travaillant avec eux dans les entreprises. La troisième est que la participation aux luttes ouvrières ne suffit pas à construire une politique de classe indépendante de la bourgeoisie.
- Défendre les ouvriers jusqu’au bout, c’est mener les luttes quotidiennes du point de vue de l’objectif des communistes qui est la révolution socialiste : la prise du pouvoir par les ouvriers conscients organisés en parti et plus largement dans des soviets. C’est donc dans les luttes encourager leurs initiatives, la démocratie, la prise de responsabilité. C’est développer leur action consciente. Et dans l’organisation, comme le PC a su le faire dans les années 1930, il faut attacher une grande importance à la formation des militants, même si nous devons aussi examiner le contenu idéologique et politique de cette formation. La défense de la Dictature du prolétariat, ce n’est pas défendre une formule, comme l’a fait le PCF pendant près de 40 ans, c’est promouvoir le rôle actif des ouvriers d’avant-garde. C’est aussi tirer des enseignements, en positif, comme en négatif des expériences historiques en URSS et en Chine.
- Défendre les intérêts ouvriers jusqu’au bout, c’est porter des revendications, mener des batailles qui construisent l’unité de la classe ouvrière, sans craindre d’être à contre courant des préjugés existants dans la classe elle-même : chauvinisme, sexisme, homophobie… Cela implique de se délimiter des politiques qui, sous des formes plus ou moins camouflées, propagent les idées bourgeoises dans la classe ouvrière ou la conciliation avec les intérêts de l’impérialisme français. Dans la bataille de la production en 1945, en abandonnant la défense du droit des colonisés à l’indépendance en 1936 et en 1945, en argumentant la paix en Algérie par l’intérêt de la France, le PCF s’est placé sur les positions de la bourgeoisie française.

 

Vouloir construire un parti de masse, alors que la bourgeoisie domine politiquement, et en dehors d’une période de crise révolutionnaire, ne peut conduire qu’à la conciliation avec les idées dominantes dans la classe. Le caractère de masse d’un parti n’est pas la garantie de son caractère politique de classe.

 

Nous avons à construire un parti de la classe ouvrière de France, de tous les ouvriers et prolétaires quelle que soit leur nationalité ou leur origine. Cela ne peut pas se faire qu’en construisant l’unité dans la lutte économique contre le patron. Cela exige de lutter effectivement contre notre impérialisme et de soutenir la lutte des peuples qui se dressent contre lui, en dépit des risques que cela peut comporter. Sauf dans ses premières années, le PCF a très souvent pratiqué un internationalisme de la déclaration démenti par son attitude pratique.

 

Gilles Fabre

[1Doriot, maire de Saint Denis, quitte peu après le PC, et crée le PPF (Parti populaire français) en entraînant de nombreux ouvriers. Le PPF deviendra à la fin des années 1930, le seul vrai parti fasciste français. Il s’engagera à fond dans la collaboration avec l’occupant nazi.

[2La réunification de la CGT (Réformiste) et de la CGTU (dirigée par les communistes) est décidée par les deux confédérations en septembre 1935. Elle se réalise en début 1936 au congrès de Toulouse. La scission avait eu lieu en 1922.

[3Les radicaux socialistes ont alors une grande influence.

[4Thorez au Comité Central du 17 octobre 1935

[5L’Humanité du 12 juillet 1934

[6Conférence nationale du 22 janvier 1939

[7Il y a plusieurs pactes qui vont bien au-delà d’un pacte de non-agression. Le premier signé le 23 août contient des clauses secrètes de délimitation des frontières et de partage d’états conquis. Il y a aussi des accords commerciaux, qui vont mettre à la disposition de l’Allemagne les matières premières qui vont permettre l’armement de l’Allemagne … et, pendant l’hiver 1941, de préparer entre autre l’attaque de l’URSS … Le 28 septembre est signé un pacte d’amitié entre l’URSS et L’Allemagne. Le 12 et 13 novembre 1940, Molotov tente de négocier à Berlin l’adhésion de l’URSS au pacte conclu entre l’Allemagne, l’Italie et le Japon. Hitler refuse.

[8Pour cela, ils font libérer des communistes arrêtés par la police de Vichy.

[9Par exemple, le programme de nationalisation est d’abord proposé par les socialistes avec l’appui de De Gaulle. Dans un premier temps le PC s’y oppose, car il ne veut pas « diviser la résistance », c’est à dire effrayer la droite de celle-ci. Il finit par s’y rallier. Il s’en fera ensuite le défenseur.

[10Huma 25 novembre 1945

[11Thorez juin 1947 sur « la voie française au socialisme »

[12La SFIO elle-même a attendu la Libération pour supprimer de son programme la référence à « une dictature du prolétariat »

[13BP du 10 juillet 1947

[14BP du 10 juillet 1947

[15Il est accusé par le PCF d’avoir utilisé des armes bactériologiques en Corée

[16Principal dirigeant du parti socialiste SFIO, qui élut pour faire la paix en Algérie, développera la guerre, et donnera les pleins pouvoir de police et de justice à l’armée en Algérie.

[17CR du secrétariat du 26 août 1955

[18Résolution du XVI e Congrès du Parti communiste français

[19Résolution du XVI e Congrès du Parti communiste français

[20PCF, Histoire du Parti communiste français- Manuel, Paris, Editions sociales, 1964, 774 p., p.693

Soutenir par un don