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ANDEVA, syndicats et réformisme

Partisan N°257 - Juin 2012

- L’ANDEVA, Association Nationale de Défense des Victimes de l’Amiante, a été crée en 1996, dans un contexte de renouveau des luttes, et d’augmentation du nombre des victimes. Qui participe à ses collectifs et quel rôle jouent-ils ?

 

Beaucoup d’adhérents sont des victimes et des « ayant-droit » membres de leurs familles. Il y a aussi des scientifiques, des médecins, quelques avocats et des militants. Par exemple, dans l’Addeva 93 (association départementale de Seine-St-Denis) se regroupent des militants CGT, CFDT, LO, NPA, des anciens du PCF, et deux collectifs d’entreprises : Renault- Chausson, et Sanofi-Aventis de Romainville et Vitry. Autour du noyau ouvrier, une dynamique de mobilisation existe : les ouvriers apportent leur témoignage de vie, leur expérience d’organisation, et les intellectuels agissent pour les aider à s’emparer des connaissances scientifiques et juridiques permettant de mieux armer leur combat. Cette lutte est un exemple intéressant d’un collectif manuels-intellectuels de résistance à la barbarie capitaliste.

 

- Penses-tu qu’il existe dans cette lutte une opposition entre une « voie des luttes » et une « voie juridique » ?

 

Non, le poser dans ces termes, ce serait comme si on opposait la lutte pour les réformes et la lutte révolutionnaire. Dans l’état actuel du rapport de force, le bras de fer contre l’Etat et les exploiteurs doit se matérialiser à un moment donné par des avancées dans le domaine juridique et législatif pour mettre un frein à la barbarie. Avec l’obligation de sécurité de résultat, l’extension des mesures gagnées à tous les produits CMR (cancérogènes, mutagènes ou dangereux pour la reproduction), les acquis du combat de l’ANDEVA sont délibérément mis au service du plus grand nombre, ce qui perturbe les objectifs d’exploitation maximale des dirigeants patronaux. Du coup, les porte-parole de la bourgeoisie ne cessent de montrer du doigt les soi-disant « avantages » dont bénéficieraient les travailleurs contaminés par l’amiante comparés aux autres salariés. Le problème (et l’intérêt pour la lutte contre la bureaucratie réformiste), c’est que les directions syndicales, toutes trempées jusqu’au milieu des années 1990 dans le Comité Permanent Amiante dirigé par le lobby des patrons de l’amiante, ne sont pas résolument opposées à cette propagande patronale.
Certes la lutte pour des acquis juridiques fait courir de grands risques à la lutte de la base : elle pompe l’énergie des militants obligés de tenir la main des avocats, et elle fait perdre de sa maîtrise sur la lutte à la masse des travailleurs en mouvement. Jusqu’à maintenant, l’ANDEVA a réussi à éviter de tels écueils et ne s’est jamais coupée du terrain, ni privée d’« opérations coup de poing" lorsque la nécessité s’en faisait sentir.

 

- Comment ces associations peuvent-elles franchir le mur du silence qui se dresse devant tous les combats ouvriers, dans cette guerre d’usure que le capitalisme mène aux travailleurs, jusqu’aux derniers jours de leur vie ?

 

Il y a chaque année des manifestations. Après celle de Saint-Quentin, il y en a eu une autre à Dunkerque le 19 décembre, en solidarité avec les 17 victimes accusées par la Cour d’Appel de Douai d’avoir trop perçu en indemnisation de leur incapacité. Des cars sont venus de toute la France, mais aussi de Belgique, d’Italie,… Les candidats à la présidentielle, les élus ont été invités à y donner leur position. Les veuves des dockers victimes de l’amiante ont manifesté avec la photo de leur conjoint décédé. Sortir de l’isolement, afficher publiquement que le capitalisme tue des milliers de gens, en toute connaissance de cause - car on connaît la dangerosité de l’amiante depuis le début du siècle -, c’est important ! Ce qui brise l’étouffoir bourgeois, c’est l’organisation de la solidarité, par-dessus les murs des boites et des quartiers, par-dessus les réalités locales et par-dessus les frontières : nombreux étaient les Italiens dans les manifs françaises. Nombreux étaient les militants de France au procès d’Eternit à Turin.
La prochaine manifestation nationale aura sans doute lieu en septembre-octobre(voir ICI). Nous y participerons, et ce sera l’occasion de revenir sur le sujet dans Partisan.

 

La première partie de l’interview : Invisible mais bien réelle : la bataille de l’amiante !

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