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Situation en Kanaky

Partisan N°275 - Juin 2014

L’histoire du pays a été émaillée de révoltes kanak, plus ou moins spontanées, sévèrement réprimées dont le dernier avatar a été la période dite des "évènements" des années 1984-1988 marquée par le massacre de 19 militants indépendantistes à Ouvéa, qui reste encore dans les mémoires. Depuis la signature de l’accord de Matignon en 1988 par Jean-Marie Tjibaou, l’extrême-gauche française s’est désintéressée de la question coloniale en Kanaky, la voie suivie depuis par le FLNKS, celle de la négociation, ne correspondant plus à l’imagerie révolutionnaire de certains. Or la lutte du peuple kanak ne s’est pas arrêtée en 1988, elle se poursuit, sous une autre forme, notamment depuis la signature de l’accord de Nouméa en 1998 qui est un accord de décolonisation progressif entre les parties impliquées : l’Etat français, la droite coloniale représentée par le RPCR, et le FNLKS, le Front de Libération Nationale Kanak Socialiste.

 

L’accord de Nouméa a une autre dimension : il reconnait le tort porté au peuple d’origine par la colonisation française, il reconnait pleinement l’identité kanak, il organise le transfert progressif et irréversible des compétences de souveraineté de l’Etat vers la Nouvelle-Calédonie, jusqu’au transfert des cinq dernières compétences régaliennes (affaires étrangères, défense, justice, monnaie et police) qui, si elles étaient effectivement transférées, rendraient ipso facto le pays indépendant. Dans la mandature qui va de 2014 à 2018, si le Congrès de la Nouvelle-Calédonie en décide au 3/5, une consultation électorale posera la question de ces derniers transferts...

L’Etat

L’Etat français, par la bouche de Sarkozy, a nettement "souhaité" que la Nouvelle-Calédonie reste française, même s’il a dans le même discours dit que l’Etat respecterait l’accord de Nouméa. Plus conciliant avec les indépendantistes, le PS est certainement dans la même logique mais accepterait peut-être une évolution vers l’indépendance avec des liens forts avec la France, ce qui permettrait à celle-ci de garder un pied dans le Pacifique. Rappelons que l’accord de Matignon a été "imposé" par Michel Rocard aux deux parties opposées et que l’accord de Nouméa a été rédigé et signé sous le gouvernement Jospin. Pour le FLNKS, il ne fait pas de doute qu’il est plus facile de discuter, de faire valoir ses droits, d’appliquer les dispositions de l’accord avec le PS qu’avec l’UMP. Le Front a appelé à voter pour le PS aux présidentielles. Du point de vue des intérêts du peuple kanak, ce positionnement se comprend parfaitement. Il ne signifie pas pour autant un accord idéologique ou politique avec la social-démocratie.

La droite locale

Longtemps tenue d’une main de fer par Jacques Lafleur, le RPCR a explosé après la signature de l’accord de Nouméa. Il n’était plus possible à la droite coloniale de continuer à tenir un discours hyper colonialiste dans ce nouveau contexte politique. Au moins l’accord a-t-il servi à cela. Depuis 1998 la droite n’a cessé de se fragmenter en factions qui se haïssent considérablement au point de n’avoir pas été en mesure de s’unir pour les élections provinciales du 11 mai.

Le mouvement indépendantiste

L’Union Calédonienne est la principale composante du FLNKS. C’était le parti de JM Tjibaou. Ce parti est né dans les années 50 à l’initiative des églises catholiques et protestantes locales soucieuses de contrecarrer l’influence grandissante du jeune et éphémère parti communiste calédonien, disparu depuis. D’abord autonomiste, il a rallié la cause indépendantiste en 1977 à l’initiative de Tjibaou. La plupart des "blancs" l’ont alors quitté, parmi ceux-ci, nombreux sont devenus ensuite membres du RPCR. Il est le plus vieux parti calédonien. Fort d’une base sociale importante, dont une bonne partie reste ancrée dans la religion, il continue de peser lourdement dans la vie du pays. Ses positions sont parfois fluctuantes, allant jusqu’à des alliances avec la droite dans le dernier gouvernement local.
Autre composante, le Palika (parti de libération kanak). Parti d’inspiration marxiste-léniniste à sa fondation, il a réuni les jeunes groupes révolutionnaires. Il détient aujourd’hui plusieurs mairies et dirige la Province nord. Son leader emblématique est Paul Néaoutyine. Ce dernier, homme d’une grande droiture intellectuelle et morale, continue à se référer au marxisme. Le Palika milite pour une société socialiste. Partant du constat de son insuffisance idéologique, l’étude du marxisme a été relancée, notamment parmi les jeunes du parti.
Autres composantes, l’UPM (union progressiste mélanésienne) implantée localement, et le RDO (Rassemblement démocratique océanien) représentant la communauté wallisienne et futunienne.
Autres indépendantistes :
Le Parti Travailliste, bras politique de l’USTKE, (union syndicale des travailleurs kanak et exploités). Louis Kotra Ureguei est le dirigeant du parti travailliste. Il fait alliance avec l’UC et le RUMP dans le dernier gouvernement actuel de NC. Homme d’affaire sur le port, il fait aussi partie du patronat local. Il a été nommé au Conseil Economique et Social à l’époque sur proposition de J. Lafleur. Il s’est servi de l’USTKE pour régler des conflits avec d’autres patrons sur le port. Il est un représentant de la bourgeoisie kanak désireuse d’indépendance. Le choix de l’appellation de "travailliste" dit tout.

 

Il n’y a pas de parti marxiste-léniniste maoiste en Kanaky. Ceci dit, il appartient aux militants révolutionnaires de France de soutenir la lutte du peule kanak et la voie qu’ils ont choisie pour faire triompher leur droit à la pleine souveraineté. Le peuple kanak est minoritaire dans un pays de 250 000 habitants...

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