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La dictature du prolétariat : seule transition au communisme

Brochure - Février 1979

Introduction

La restauration du capitalisme en U.R.S.S. après le putsch de Khrouchtchev a été un coup sérieux porté à la cause du socialisme. La dictature du prolétariat sur la bourgeoisie y a été transformée en son contraire : la dictature des nouveaux bourgeois soviétiques contre les peuples. La propagande de la bourgeoisie a pu se déchaîner pour clamer qu’il n’y avait au fond strictement aucune différence entre la violence fasciste des nouveaux bourgeois et celle que le peuple exerçait autrefois contre ses exploiteurs pendant et après la révolution de 1917. Aucune différence entre la libération de l’Europe par l’armée rouge et les forces résistantes en 1945 et l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes impérialistes russes. Le monde "libre" n’a jamais été qu’un gigantesque champ de bataille, s’est toujours nourri du sang, de l’exploitation, de la misère des centaines de millions de prolétaires et peuples colonisés. Et ceux qui en vivent, la poignée de ceux qui jouissent des avantages et de la liberté que leur procure le pouvoir et la richesse, unissent leurs voix comme les crapauds la nuit pour déclarer que le socialisme c’est "le totalitarisme", le capitalisme, la liberté ! Chœur auquel se joint celui des révisionnistes pour qui le socialisme n’est pas autre chose que le capitalisme "amélioré", plus "démocratique" !

 

La Chine et l’Albanie socialistes, conduites par le P.C.C. et le P.T.A., se portèrent au premier rang pour combattre le révisionnisme moderne dans les années 60, pour défendre le socialisme et tracer une nette ligne de démarcation entre les deux. Le P.C.C. avec à sa tête Mao Tsé-toung déclencha notamment un vaste mouvement de lutte contre la nouvelle bourgeoisie et le révisionnisme en Chine : la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne (G.R.C.P.). Cette révolution était fondée par un premier bilan de la restauration du capitalisme en U.R.S.S., une première analyse des erreurs et insuffisances qui l’avaient favorisée. Première révolution de ce type, expérience nouvelle et sans exemple historique, la GRCP reçut le soutien enthousiaste de toutes les forces révolutionnaires marxistes-léninistes dans le monde et de masses innombrables. Elle portait profondément l’espoir d’une victoire radicale du prolétariat contre les tentatives de restauration du capitalisme en Chine socialiste, le quart de l’humanité. L’espoir que ce qui s’était produit en U.R.S.S. ne se reproduirait plus.

 

Aussi la prise du pouvoir en Chine par la clique révisionniste dirigée par Hua - Teng, et la marche rapide vers la restauration du capitalisme qui s’en suivit, et s’en suit aujourd’hui encore, sont des faits qui ont plongé bien des révolutionnaires sincères dans le doute, le désespoir, voire, pour quelques-uns, le reniement et la trahison. D’autant qu’au même moment l’héroïque victoire des peuples de l’ex-Indochine était suivie du conflit Vietnam - Cambodge.

 

U.R.S.S., Chine, Vietnam, etc... : il est facile à la bourgeoisie, il est facile à ses intellectuels et à ses porte-paroles, de faire valoir qu’une telle suite de faits prouvent que c’est l’idée même du communisme qui ne tient pas debout. Que mieux vaut abandonner cette lutte. Que le "vrai" socialisme n’est qu’un rêve utopique qui n’a jamais pu connaître le moindre début de réalisation sans se transformer immédiatement en son contraire : le "goulag", le nationalisme, le capitalisme d’Etat.

 

D’autres prétendent toujours se battre pour le socialisme, mais trouvent plus commode de ne pas assumer les luttes et difficultés du passé et de reconnaître aussi que le socialisme n’a jamais existé en Chine ou en U.R.S.S. (tout juste avec Lénine peut-être), abandonnant ainsi la défense du socialisme. Ceci sous prétexte que des erreurs ont été commises. Certes ne nions pas les erreurs. Comment d’ailleurs n’en commettre aucune ? Sachons tirer la leçon des erreurs quand vient notre tour d’agir. Mais sachons aussi ne pas jeter l’enfant avec l’eau du bain.

 

Notre époque a vu, en quelques cent années seulement, la vague des révolutions prolétariennes déferler sur le monde. De la France de 1872 à la Russie de 1917. Puis jusqu’au milliard d’hommes qui, après la 2ème guerre mondiale, entreprenaient l’édification du socialisme sur presque la moitié du globe, en Europe comme en Asie, de l’Albanie jusqu’à la Chine. Guidés par des partis marxistes-léninistes qui avaient su se porter à la tête du combat. Cela ne saurait être oublié. Et lorsqu’on envisage les échecs subis, nous ne devons pas oublier non plus que toutes ces formidables révolutions ont eu lieu au sein de difficultés inouïes. Qu’elles ont eu à faire accoucher le socialisme, le monde nouveau, des ventres qui étaient les moins préparés à le concevoir : de pays le plus souvent arriérés économiquement, où le prolétariat était très peu nombreux (moins de 1 % de la population en Chine en 1949). Qu’elles ont eu à faire face à des guerres d’agression impérialiste extraordinairement meurtrières.

 

Il ne s’agit pas ici de fournir un bilan historique complet et de répondre à toutes les questions. Il faudra longtemps pour démêler sur chaque fait le vrai du faux, la vérité de la calomnie. Il n’y a pas de bilan sérieux qui ne tienne pas compte de l’ensemble des conditions historiques concrètes. Aussi, parlant des expériences du socialisme, la première chose est de tracer une nette ligne de démarcation entre socialisme et capitalisme. Entre les erreurs commises par des partis et dirigeants communistes et une ligne politique systématique de restauration du capitalisme. Nous devons refuser de s’en tenir à certains aspects isolés des choses pour prétendre que Khrouchtchev était contenu dans Staline, Staline dans Lénine, Lénine dans Marx. Mais rétablir l’analyse historique sur la base du matérialisme dialectique qui distingue les changements qualitatifs, les bonds, au contraire de l’évolutionnisme vulgaire.

 

En particulier analyser l’expérience c’est, pour nous communistes français, se garder comme la peste du point de vue de l’intellectuel démocrate petit-bourgeois. Celui-ci juge de la "supériorité" du système capitaliste sur le système socialiste à travers les lunettes des libertés et privilèges que lui concède la bourgeoisie impérialiste : droits d’écrire, de parler à la télé, etc... Cet intellectuel jouit de ces droits et d’une vie confortable de tout repos. Mais il "oublie" d’admettre que cette liberté n’est pas accordée au prolétariat. Il "oublie" que cette liberté repose en fait sur l’oppression inouïe que subissent les peuples dominés par l’impérialisme. Car là est le secret de la "supériorité" d’une poignée de pays capitalistes sur d’autres pays socialistes quant au niveau de vie et aux libertés dont jouit une minorité (et qu’ils opposent d’autant plus au socialisme qu’effectivement le prolétariat au pouvoir supprimera tous ces privilèges, tandis qu’il organisera la démocratie pour les masses ex­ploitées).

 

Défendre le socialisme n’est pas un acte de foi. Critiquer le socialisme du fond de son fauteuil est au nom de l’Idée de la Révolution Pure est bien facile. De même défendre le socialisme n’a de sens que si nous luttons pour le socialisme. C’est parce que nous luttons pour le socialisme que nous voulons mieux comprendre les expériences passées ou en cours. Ce n’est qu’en luttant nous-mêmes en ce sens, et au fur et à mesure de l’avancée de cette lutte, que nous pourrons vraiment comprendre jusque dans leurs fondements toute la richesse de ces expériences, en confrontation concrète et réelle avec les questions de notre révolution, de notre pratique révolutionnaire.

 

Aujourd’hui nous ne pouvons pas encore tirer un bilan complet de toutes les expériences. Non seulement parce que nos forces sont faibles par rapport à l’immensité des tâches dans la classe ouvrière, qui ne se réduisent pas à ce bilan. Non seulement parce que nous manquent beaucoup de véritables et crédibles informations. Mais aussi parce qu’il s’agit d’une tâche qui nécessite la participation des communistes de tous les continents, une tâche internationale, faute de quoi le risque serait grand que se développe un point de vue étriqué et purement dogmatique qui ne tienne pas compte des faits et réalités. Aussi ne pourrons- nous, pour toutes ces raisons, apporter de bilans et conclusions précises et scientifiques à toutes les questions posées, par les expériences du socialisme en U.R.S.S. et en Chine, avant un long travail et des études minutieuses.
Ceci n’implique pas que nous ne devions rien faire aujourd’hui en ce sens. Au contraire.

 

Nous pouvons et devons tout d’abord assimiler l’expérience historique telle qu’elle peut nous parvenir à travers les œuvres des grands dirigeants prolétariens. L’expérience de la Commune de Paris synthétisée par Marx, qui en tira notamment cette thèse fondamentale de la nécessité de la destruction de l’Etat bourgeois. L’expérience de la Révolution d’Octobre 1917, avec les magistrales leçons de Lénine sur le rôle de la dictature du seul prolétariat après la prise du pouvoir, l’alliance ouvriers-paysans, la construction du socialisme dans un seul pays et bien d’autres thèses de première importance sur la tactique, la poursuite de la révolution, le rôle des Soviets, etc...
L’expérience encore de la lutte du P.C.(b) de 1’U.R.S.S., sous la direction de Staline, avec ses succès et ses erreurs, pour persévérer dans la voie léniniste, poursuivre l’édification socialiste et vaincre l’agression fasciste. L’expérience de la G.R.C.P. sous la direction de Mao Tsé-toung, qui développa notamment la théorie marxiste-léniniste sur la question de la poursuite de la révolution sous le socialisme, mettent à jour les bases sociales de la nouvelle bourgeoisie sous le socialisme, et éclairant de manière précise la lutte entre les deux lignes, les deux voies, les deux classes qui s’y déroule. L’expérience du Parti du Travail d’Albanie qui se tient aujourd’hui à la tête de la lutte contre le révisionnisme moderne.

 

Toutes ces révolutions ont vu les prolétaires et les peuples "partir à l’assaut du ciel". Certes bien des erreurs ont été commises : comme si le nouveau pouvait naître autrement qu’à travers une série d’expériences historiques ! Toutes ces révolutions ont justement apporté des leçons qui ont servi les suivantes. Malgré tel ou tel échec, elles font partie de notre lutte révolutionnaire aujourd’hui. Tirer la leçon de leurs erreurs n’est pas nier leur grandeur. Nous ne les renions pas. Pas plus que Marx n’a renié la Commune de Paris dont il a vu, mieux que tout autre, les faiblesses.

 

L’objet du texte qui suit sur la dictature du prolétariat sera donc d’abord d’essayer de résumer l’essentiel de cette expérience historique. De rappeler ce que cette expérience nous permet de savoir aujourd’hui de la dictature du prolétariat (et qui ne pouvait pas être entièrement connu hier).

 

Par la suite, nous poursuivrons la publication d’études sur des problèmes plus particuliers de la lutte des classes sous le socialisme, afin d’analyser le plus précisément possible (et en fonction des informations limitées dont nous disposons) quelles sont les erreurs commises par la dictature du prolétariat qui favorisent la prise du pouvoir par la nouvelle bourgeoisie, ainsi que les succès remportés par le socialisme depuis plus d’un siècle. Ceci non pour faire œuvre d’historien, mais en fonction de la lutte que nous menons pour que la classe ouvrière de France fusionne avec le marxisme-léninisme et se fixe pour but d’instaurer le socialisme. Nous n’avons pas pour tâche d’écrire l’histoire de la Chine ou de 1’U.R.S.S. (qu’écriront les communistes de ces pays), mais de fixer au prolétariat de France le programme du socialisme qui convient à notre situation spécifique en nous appuyant sur ce qu’il y a d’universel dans les expériences qui nous ont précédés et que résume la théorie marxiste-léniniste sur la dictature du prolétariat.

 

Le texte qui suit est donc une première contribution à ce travail. Et nous nous fixons pour tâche de pouvoir, d’ici un an, publier trimestriellement une revue théorique qui le poursuivra régulièrement. Cette contribution a été rédigée par un camarade de P.L.P. à la demande et sur les directives de son Comité Directeur. Ce qui explique l’apparition de signature, pour la première fois, dans les publications de P.L.P. : le développement de l’organisation exige de fixer plus précisément les responsabilités à ce niveau. Bien évidemment la publication de telles contributions signifie que P.L.P. estime que la discussion et la lutte sur les questions du socialisme doivent concerner aujourd’hui tous ceux qui se réclament sincèrement du marxisme-léninisme, et pas seulement les camarades de l’organisation.

 

Menant cette lutte, comme toujours ouvertement, P.L.P. se renforcera toujours plus des meilleurs éléments communistes qui en comprendront la nécessité et l’urgence, et comprendront qu’ils doivent nous rejoindre pour en élever le niveau et la force.

 

Le 30 décembre 1978 – Le Comité Directeur


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Sommaire :

Résolution du Comité Central de l’OCML Voie Prolétarienne sur la brochure « La dictature du prolétariat, seule transition au communisme » (juillet 1979)

 


1. La Dictature du Prolétariat : nœud de l’opposition entre réformistes et révolutionnaires

 


2. Les communistes luttent pour l’abolition des classes

 


3. Nécessité de la transition de dictature du prolétariat

 


4. L’existence des classes sous le socialisme
- 4-1 Subsistent les anciens exploiteurs
- 4-2 La masse petite-bourgeoise oscille entre prolétariat et bourgeoisie
- 4-3 Une nouvelle bourgeoisie se reproduit sous le socialisme
- 4-4 Le « droit bourgeois » sert la reproduction de la bourgeoisie sous le socialisme

 


5. La lutte des classes, axe de la transition au communisme
- 5-1 La bourgeoisie lutte pour élargir le « droit bourgeois » et conquérir la superstructure
- 5-2 Réduire les inégalités. Renforcer le pouvoir du prolétariat dans la superstructure
- 5-3 Développer les forces productives, nécessité pour changer les rapports de production et supprimer les bases matérielles de l’existence des classes

 


6. La dictature du prolétariat, moyen et instrument de la victoire dans la lutte pour le communisme
- 6-1 Pourquoi la dictature d’une seule classe : le prolétariat
- 6-2 La dictature du prolétariat est une forme particulière d’alliance de classe
- 6-3 Le prolétariat dirige. Le peuple édifie lui-même le socialisme
6.3.1. Le rôle dirigeant du parti
6.3.2. Le contrôle ouvrier
6.3.3. Démocratie socialiste. Exercice du pouvoir du peuple

 


7) Les tâches internationales de la dictature du prolétariat

 

Annexes
- Forces productives et rapports de production
- Infrastructure et superstructure

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